Point de vue : La femme à égalité ? Hum…
Sylvette Denèfle est sociologue à l’université François-Rabelais de Tours. Elle analyse ici sans concession la réalité des femmes au travail.
« Dans mon milieu professionnel où les étudiantes et les maîtres de conférences sont majoritairement des femmes, il n’y a plus que 20 % de femmes professeurs des universités…. ». Sylvette Denèfle ne prend pas partie. Elle constate. Et pas que dans le monde académique. En bonne sociologue, son verdict est sans appel : « Oui, dit-elle, on peut considérer que les femmes ont accès aux emplois salariés, mais pas forcément à tout le monde du travail ou alors, dans certains secteurs.
Elles sont 85 % à occuper des postes dans les services, les aides aux personnes âgées, la garde d’enfants, les ménages. Les sociologues regardent l’ensemble des données : le travail domestique continue à incomber aux femmes (98 % des femmes font la lessive) et 80 % des emplois féminins sont sous-valorisés. Si la structure de l’emploi se féminise dans beaucoup d’entreprises, cela ne signifie pas que l’égalité est obtenue… ».
Mixité. Égalité ou Équité ? Sylvette Denèfle tient à nuancer ces notions le plus souvent mélangées, voire galvaudées. « On a beaucoup parlé des droits des femmes ou de lutte contre les discriminations. Et puis, on réfléchit à la notion de genre. Quels rôles la société attribue-t-elle aux hommes et aux femmes ? Cette différenciation relève d’une construction sociale qui est confondue avec la réalité biologique du sexe. L’égalité suppose qu’homme et femmes soient traités de la même façon. L’équité suppose que chacun soit traité en fonction de son mérite. Un même salaire, en apparence seulement! On a fait trois ou quatre lois en vingt ans pour établir l’égalité professionnelle mais sans grand résultat. La loi et les pratiques divergent, la loi contre le racisme a-t-elle fait reculer le racisme ? ».
Un partage du travail qui n’existe pas ! Plus la société est en crise et moins on fait de place aux femmes dans le monde économique. De quoi faire réagir… Avec ce dernier argument béton : « Regardons les retraites de misère des femmes. Cela montre bien qu’elles n’ont pas eu les mêmes possibilités que les hommes dans leur vie professionnelle ! ».
Témoignage :
“ Préférer l’équité
au terme d’égalité… ”
Laurence Hervé (photo) préside « Femmes 3000 », association (mixte) qui se donne pour objectif de créer du lien à travers l’organisation d’événements (conférences, débats). « Les femmes qui nous rejoignent demandent de suite si l’on est un mouvement féministe. Je réponds que c’est la cause des femmes qui nous anime… ». Pour Laurence Hervé, le fameux plafond de verre se situe « d’abord dans la tête des femmes. La plupart d’entre elles s’autocensurent alors qu’elles doivent s’autoriser les choses par elles-mêmes. Il faut qu’on se fasse plaisir ! D’ailleurs, la loi le permet ! Néanmoins, la situation ne s’améliore pas contrairement à ce que l’on peut croire. Il y a encore trop de stéréotypes sur la perception des femmes dans les entreprises.
Soit elles sont carriéristes, au sens masculin, soit on pense qu’elles vont pouvoir mener de front carrière et vie personnelle. Je pense qu’il faut mettre des codes plus féminins dans l’entreprise : bannir les réunions du soir par exemple, introduire la sophrologie, les services de conciergerie, les massages, aller vers une prise en compte différente de l’humain. Oui, les femmes peuvent changer la vision de l’entreprise Préférons pour l’instant l’équité au terme d’égalité… ».