DOSSIER Fraudes : le jackpot reste invisible
Douanes, police, gendarmerie et Parquet se mobilisent pour contrer et mesurer l’économie souterraine qui se chiffre à des millions d’euros.
Le catalogue des fraudes est épais. Percevoir par exemple, grâce à de faux documents, l’allocation pour un emploi « perdu » qu’on n’a jamais exercé (8 % des fraudes) ; continuer de toucher l’allocation alors qu’on a créé son entreprise (7 % des fraudes) ; percevoir l’allocation alors qu’on réside à l’étranger (4 % des fraudes) ; la percevoir alors qu’on est en prison. Mieux : être vraiment chômeur, mais en faire travailler d’autres (pas gratuitement !) sous de fausses identités. En formant encore mieux ses agents, en croisant ses fichiers avec la Caisse d’allocations familiales (Caf), la CPAM, les impôts, la Carsat et quelques autres organismes, ou encore en établissant une cartographie des fraudes, Pôle emploi compte bien agir de plus en plus en amont.
Les fraudes ? En 2013, la CPAM a enregistré 94 cas contre 146 en 2012, soit une baisse notoire de 36 %. 28 % de ces fraudes étaient imputables aux assurés, 24 % à des établissements de soins et 48 % à des professionnels de santé. La Caisse d’Indre-et-Loire a notamment été victime d’une fraude massive de dentistes de la région parisienne dont le montant s’est élevé à plus de 160.000 euros. Au total, la caisse a subi l’an passé un préjudice de 642.000 euros indus (contre 442.000 en 2012). En revanche, les contrôles et recours lui ont permis de récupérer 8,2 millions d’euros.
Tous les types de fraudes
Invitation du Parquet de Tours. M. le Procureur, très occupé par l’affaire de Joué-lès-Tours, accepte de nous recevoir. « Quantifier les fraudes, c’est difficile, déclare d’emblée Jean-Luc Beck. Il y a un microcosme qui fonctionne hors du cadre légal. Activités parallèles = oui ! Économie souterraine = oui ! Il y a de l’argent non officiel ! Il y a de plus en plus de gens qui préfèrent la débrouille. Mais ils scient la branche sur laquelle ils sont assis ! Ce qui m’inquiète : c’est le problème de santé publique ! ».
Les stups en Indre-et-Loire ? Voilà un sujet majeur dans les zones police et gendarmerie ! Sur l’agglomération de Tours, le commissaire Chassaing peut en témoigner : « Tout le monde fume au grand jour ! Les lieux sont identifiés : quais de Loire, Rabatterie, Vieux-Tours, Rabière ! L’héroïne est festive mais dangereuse ! La consommation de cannabis est en hausse ! Le chiffre vrai de cette économie est énorme ! Mais sachez que nous faisons de la prévention dans les lycées professionnels, les collèges, les CFA ! On ne baisse pas les bras… ».
Pas encore de chiffres. Le jackpot reste invisible, même en gendarmerie qui a le soutien du groupe d’intervention régional d’Orléans. Mais
les cibles sont connues : gens du voyage pour les vols de chantier, faux commerçants ambulants ou entrepreneurs aux prestations sociales, dans le BTP, des loueurs de chambres… Quatre brigades de recherches veillent en Indre-et-Loire. Une cellule d’enquêtes pour la lutte contre le travail illégal aussi ! Traffics (stups, véhicules, armes), travail illégal, infractions économiques et financières, fraudes aux prestations sociales : les champs d’investigation sont nombreux. Et les dossiers en hausse.