“ Leurs histoires familiales façonnent le présent ! ”
Ancienne directrice de l’Observatoire de l’économie et des territoires de Touraine, Claude Chéron estime que les entreprises familiales ont influencé le paysage économique.
Dans votre livre Industries de Touraine paru aux éditions Sutton, vous avez abordé les racines familiales des entreprises, des années Vingt à 2005.
« Il y a eu effectivement de grandes dynasties, à commencer par les Mame. Les dirigeants successifs avaient une vision très sociale et intégraient les logements, la mutuelle de santé, l’école, l’épicerie etc. On peut encore citer Rolland-Pilain, le début de l’industrie pharmaceutique avec Métadier, la cartonnerie Oudin, Poirier qui décida de fabriquer ses fauteuils roulants, lui-même étant handicapé, Gault et Frémont, les soieries Roze et Le Manach, Bergerault. Tous ces noms ont influencé le paysage économique d’aujourd’hui. »
Comme par exemple ?
« Dès les années Vingt, un inspecteur du travail de l’époque, Jacques Aupetit, décrivait une Touraine plutôt industrielle. Cette vocation perdure aujourd’hui. Il y a l’âme de Métadier chez Sanofi. Chateau-Renault était une ville ouvrière avec la présence des tanneries. Aujourd’hui, il y a beaucoup de main-d’œuvre et de savoir faire, de reconversion aussi dans un bassin qui concentre des manufactures. C’est pareil à Descartes. Regardez aussi nos vignerons. Les patronymes sont les mêmes depuis des générations. »
Entreprendre aujourd’hui correspond-il au même état d’esprit qu’autrefois ?
« Dans la tête des chefs d’entreprises d’autrefois, il y avait la volonté de transmettre à un fils ou quelqu’un de la famille. Ce n’est plus le cas vraiment aujourd’hui. Quand quelqu’un crée une start-up, c’est pour la revendre un jour. L’approche est différente. Je ne vois pas comment on peut construire des empires dynastiques. Et avec les nouvelles technologies, je crains que les gens soient de moins en moins liés aux territoires. »