Banlieusards parisiens depuis Tours
Ils sont près de 5.000 usagers à partir, chaque jour, travailler dans notre capitale par le train. Un phénomène sociologique et économique en Touraine.
On les appelle les célibataires géographiques, les migrants professionnels, les navetteurs ou les turbo profs. Ils voyagent par le train pour faire le trajet domicile-travail. Leurs rotations sont quotidiennes, voire hebdomadaires. Ces usagers des gares de Tours et de Saint-Pierre-des-Corps – mais pas seulement – ont inscrit leur organisation dans la durée. Employés et cadres (intermédiaires) en difficulté sur le marché du travail local ont fait de Paris leur destination professionnelle comme un moyen d’échapper au chômage, de maintenir un bon niveau de salaire et de compétence.
Leur nombre se situerait entre 4.000 et 5.000 personnes. Dans une enquête menée par Beauvais Consultants et l’université François-Rabelais (2007) , ils étaient plus d’un millier à travailler sur Paris intra-muros, 3.500 en Ile-de-France. Impossible d’en avoir confirmation auprès de la SNCF qui ne veut pas communiquer sur les TGVistes. C’est une véritable manne financière pour la compagnie ! Car ce sont près de 90.000 voyages par mois pour ceux qui font l’aller-retour chaque jour et 35.000 pour les bi-résidents. Et un budget qui oscille entre 300 et 500 euros par mois, pris en charge partiellement ou totalement par l’employeur. À ce sujet, le coût généralisé privé occasionné par les navettes est pour certains supportable, par rapport aux revenus du ménage. Et ne l’est pas pour ceux qui gagnent moins de 2.000 euros par mois.
Des horaires généralement tenus
Les chercheurs tourangeaux mettent en avant que rentrer chaque soir peut être considéré comme un mode de vie durable, soit en moyenne depuis 10 ans. Les facteurs de maintien dans l’organisation passent aussi par la maîtrise de la gestion du temps de travail, d’arrivée et de départ, le recours partiel au télétravail, la maîtrise par le conjoint de l’organisation familiale. Mais toute médaille a son revers. « Il faut un couple soudé » témoigne Hervé de Ballan-Miré, navetteur du lundi matin au vendredi soir. Régis, cadre informaticien, avance page suivante, qu’après en avoir discuté avec d’autres collègues, beaucoup de conjoints « ne comprennent pas » que la vie soit réglée par des horaires de trains…
Les DRH parisiens ne font pas de cette mobilité géographique provinciale un casus belli. Car nos Tourangeaux figurent le plus souvent parmi ceux qui arrivent à l’heure, bien que le trajet de 55 minutes soit passé à plus d’une heure ces dernières années. Et les banlieusards parisiens rencontrent bien plus d’aléas dans leur circulation quotidienne.
Cadres supérieurs, voyageurs professionnels satisfaits ou employés sous contrainte façonnent autant de visages à la Janus de cette population si particulière. La proximité toute relative de notre territoire avec Paris, les liaisons ferroviaires multiples interrégionales (Nantes, Orléans) ou locales depuis Loches et Chinon, favorisent les déplacements professionnels. À chacun de s’approprier le temps.