Les travailleurs handicapés en quête de reconnaissance
Au moment où paraît ce numéro de Capéco, la Délégation Centre-Val de Loire de l’Agefiph ouvre la 20e Semaine pour l’emploi des personnes handicapées avec un événement : « Place pour l’Emploi ». Ouverte à différents publics (personnes handicapées, entreprises, professionnels, institutionnels…), cette manifestation invite aux rencontres, aux échanges, aux contributions et à l’action. Elle est aussi un espace où se dessinent et se construisent les solutions de demain pour l’emploi des personnes handicapées.
Le nombre de travailleurs handicapés en Indre-et-Loire n’est pas quantifié. Cela traduit une volonté de ne pas les discriminer. Par contre, on connaît leur nombre de demandeurs d’emploi : 3.736 au premier semestre 2016, un chiffre en augmentation de 1,6 % sur un an. Dans le Loiret, cette population représente 4.034 personnes (+ 0,4 %). Et à l’échelle de la région Centre Val-de-Loire, ils sont 16.674, en augmentation de 2,1 %. C’est un peu moins que la moyenne nationale (+ 2,3 %). Animateur à la Direccte de la politique de l’emploi en faveur du travail des handicapés, Paul Sehki avance une explication : « Tours et Orléans concentrent le plus gros de la démographie de nos territoires, avec des personnes confrontées à des problèmes de santé qui vont là où elles sont sûres d’être bien soignées. L’attractivité des dispositifs médicaux est indéniable. J’y vois aussi comme une sorte de logique de l’Histoire. Tours a été la capitale des armées alliées en matières d’offres hospitalière pour les grands blessés et invalides. C’est à Fondettes que fut lancé le premier modèle de fauteuil roulant… »
Les reconnaissances administratives en hausse
Pour la déléguée régionale de l’Agefiph, Christelle Péan interviewée dans cette enquête, « deux facteurs peuvent expliquer un chômage élevé de personnes handicapées dans un département : le nombre de personnes handicapées en demande d’emploi augmente plus vite que celui des personnes accédant à l’emploi. Il ne faut pas oublier enfin que le nombre de personnes qui obtiennent une reconnaissance administrative de leur handicap ne cesse de croître. Sur le plan national, nous sommes passés de 1,8 millions en 2007 à 2,4 millions en 2014. Cette hausse étant en lien avec le vieillissement de la population et l’allongement de la vie au travail, on peut considérer que les départements les plus touchés par ce phénomène voient le nombre de personnes handicapées augmenter. »
Et l’entreprise dans tout cela ? Celles du secteur privé et les établissements publics à caractère industriel ou commercial de plus de 20 salariés sont assujettis à l’obligation d’emploi d’au moins 6 % de travailleurs handicapés en proportion de leurs effectifs (loi du 11 février 2005). Par ailleurs et avant 2005 (loi sur l’égalité des chances), il existait les ateliers protégés et les centres d’aide par le travail (CAT). Ils ont été respectivement remplacés aujourd’hui par les entreprises adaptées – elles représentent 400 emplois dans le département – et par les soixante établissements et services d’aide par le travail (ESAT), considérés comme des structures médico-sociales de travail protégé, visant l’insertion ou la réinsertion sociale et professionnelle.
L’une d’elles basée à Loudun intervient de façon très originale en Indre-et-Loire. Sept travailleurs handicapés sont détachés aux Vignobles du paradis, domaine situé à la Roche-Clermault près de Chinon. Le directeur Romain Parisis témoigne : « Ce sont des gens d’abord très autonomes qui sont régulièrement formés, encadrés par trois techniciens. Ils entretiennent les vignes et vendangent. Notre production s’élève à 250.000 bouteilles par an. L’activité est rentable depuis cinq ans. Cela n’a pas été simple d’être reconnu par la profession. Pourtant, nous avons obtenu de nombreuses médailles dans différents salons… »
La reconnaissance : telle est la quête revendiquée et permanente des personnes handicapées. Invitée du réseau Carnet Pro du groupe La Nouvelle République, la championne paralympque Marie-Amélie Le Fur insiste : « Les entreprises ont encore un peu peur du handicap. Elles doivent recruter les gens pour leurs compétences et non pour remplir un quota… ». Elle a été embauchée à 50 % de son temps par EDF comme pilote d’affaires dans la conduite du changement et travaille pour la centrale de Saint-Laurent-des-eaux. « La notion de handicap et celle de la performance sont indisociables » vient-elle témoigner.
Preuve que tous les métiers et secteurs peuvent s’ouvrir, les évolutions les plus fortes en termes de respect de l’obligation d’emploi se trouvent dans les transports aériens, la restauration, le commerce et la réparation automobile.