“ Une extension de l’action des syndicats… ”
Le directeur du Master Juriste d’entreprise de l’université, Vincent Roulet, rappelle les fonctions des comités d’entreprise et ses enjeux politiques.
Les comités s’entreprise sont-ils nés de la fibre syndicale ?
« Le propre du syndicalisme, c’est d’agir en faveur des salariés. Cette protection a pris la forme de lutte des classes, une idée marxiste qui a pris pied dès 1884. La place du comité d’entreprise est extrêmement plus ambiguë. Sa finalité, c’est l’association des salariés à la direction de l’entreprise. On a abandonné la lutte des classes pour travailler ensemble. Le Conseil national de la résistance l’a d’ailleurs inscrit dans le préambule de la Constitution dans l’article 8 : Tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises. C’était la traduction d’une idée politique entre gaullistes et communistes. Le CE est une extension de l’action des syndicats mais c’est un autre pouvoir. »
Quelles sont aujourd’hui les fonctions des comités d’entreprise ?
« J’y vois deux fonctions essentielles : économique d’abord où les représentants des salariés sont tenus au courant de la gestion de l’entreprise sans qu’ils soient décisionnaires contrairement au modèle allemand. Fonction sociale et culturelle ensuite. 0,2 % de la masse salariale est affectée aux activités économiques des CE. En 50 ans, les CE ont acquis non seulement leur légitimité au sein de l’entreprise et auprès des salariés, mais aussi une force financière considérable qui dépasse de très loin les activités traditionnelles comme les arbres de Noël. L’État y est-il pour quelque chose ? Il faut savoir que les chèques cadeaux sont assujettis à la charge sociale et à l’impôt. »
Dernier avatar connu, les nouvelles dispositions contenues dans la loi Rebsamen de 2015…
« Dans le but de simplifier l’information et la consultation annuelle du comité d’entreprise, la loi Rebsamen du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi réforme les nombreuses procédures qui existaient en la matière. En effet, pour pallier à la dilution de l’information transmise au CE et rendre les consultations plus cohérentes, la loi Rebsamen regroupe l’ensemble de ces procédures en trois grandes consultations. La consultation sur le bilan social dans les entreprises d’au moins 300 salariés est maintenue mais elle appartient désormais à une des trois grandes familles de consultations, celle relative à la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi. Il y a de vrais enjeux politiques ! »
Vincent Roulet est membre du laboratoire de droit social de l’Université Paris II et maître de conférences à l’Université de Tours où il dirige le Master II. Juriste d’entreprise et conseiller scientifique du Cabinet BRL Avocats.