Le festival bd Boum à Blois vient de distinguer l’auteur Lax pour son œuvre. Rencontre avec un fan de vélo qui aime se remettre en question.
Vous avez eu le prix de la bande dessinée historique aux Rendez-vous de l’histoire en 2005, bd Boum vient de vous distinguer pour votre œuvre que l’on peut dire fortement marquée par l’histoire ?
« J’aime appuyer les histoires sur une période précise, pour la raconter avec un nécessaire recul. Je remonte à la génération de mes grands-parents, c’est-à-dire le début du XXe siècle. J’ai notamment travaillé sur la guerre 14-18. Mais il s’agit toujours de fiction, où mes personnages fictifs côtoient des personnages de la grande histoire. Cela leur procure une crédibilité supplémentaire, cela laisse à croire qu’ils auraient pu réellement exister. Ce que je souhaite montrer, c’est à quel point l’histoire sociale pèse sur chaque génération. »
Comme dans votre dernière BD, Amère patrie, sur l’honneur des familles de combattants ?
« Pour la première fois je ne suis que scénariste, j’ai écrit pour un autre dessinateur. Il y a beaucoup d’œuvres qui sortent sur la Première Guerre mondiale, parce qu’on est nombreux à vouloir faire vivre le devoir de mémoire, c’est une génération désormais disparue. Si j’avais su, enfant, que je deviendrais un auteur de BD, j’aurais davantage interrogé mon grand-père. Je ne serais pas étonné de voir des albums fleurir sur les conflits plus récents. »
Quelles sont les forces de la BD pour décrire les conflits ?
« Je ne fais jamais une image pour une image. Le dessin doit servir une narration. Il a souvent un impact très supérieur au cinéma ou à la télévision qui présentent des images très fugitives. Sur le dessin d’une BD, on peut s’attarder autant qu’on le veut. Il a un pouvoir de persuasion énorme. Ce n’est pas pour rien si la propagande politique a largement utilisé l’affiche, c’est un outil qui a fait ses preuves. La magie et l’impact du dessin restent incomparables. »
Votre œuvre reste aussi très éclectique, est-ce un besoin revendiqué de changer de genre ?
« Je me suis mis tardivement à la bande dessinée, j’ai sorti ma première à une trentaine d’années. J’ai pris mon temps, mais si je travaillais dans la pub, je n’ai jamais perdu de vue mon espoir de devenir dessinateur. J’ai commencé par la BD jeunesse, la BD animalière, j’avais un dessin rond et rassurant. Puis j’ai émergé au moment où la BD adulte explosait. Depuis toujours, j’aime me remettre en question, je refuse de m’installer dans un ronron graphique. Lorsque j’ai fait Azrayen sur la guerre d’Algérie, j’ai pris un tournant graphique majeur. J’ai mis plusieurs mois à me défaire de mon dessin trop conventionnel. J’avais besoin d’acquérir un dessin plus personnel et ça a été comme une renaissance. Je suis reparti plein d’enthousiasme. J’aime passer du noir et blanc à la couleur, dans la couleur de l’aquarelle au feutre, jouer sur du papier lisse ou un effet de matière. Et je mets ces techniques au diapason de ce que je veux raconter. Pour Pain d’alouette, sur le Paris-Roubaix d’entre les deux guerres, j’ai sali mon trait, qui se mélange à la couleur en provoquant une bavure. Pour que l’on sente le Nord, la pluie, le froid. On est dans le Paris-Roubaix. »
Propos recueillis par Béatrice Bossard
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Lax a obtenu samedi soir le Grand Boum 2011 de la ville de Blois.
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Il dessinera l’affiche du festival bd Boum 2012.
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Lax a écrit sur sa passion, le vélo : « L’Aigle sans orteils » et « Pain d’alouette » (éd. Futuropolis).
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Sa dernière collaboration est « Amère patrie » (éd. Dupuis), dont il est le scénariste.
> Retrouvez le dossier complet réalisé par la Nouvelle République sur l’édition 2011 de BD Boum à l’adresse suivante.