Simon Hureau et Intrus à l’étrange ont décroché le prix Nouvelle
République au festival de Blois. Plongée dans un travail à l’encre ambitieux et très personnel.
Le titre, Intrus à l’étrange, le choix de l’encre en noir et blanc, le papier d’une superbe qualité, c’est vous qui avez pu les choisir pour cette œuvre très personnelle ?
« Oui, j’ai réussi à faire passer mon titre, même si ça n’a pas été facile ! La boîte à bulles est une petite maison d’édition où l’on peut discuter de tous ces paramètres, qui n’a pas peur de suivre les auteurs quand ils changent de registre. C’est une chance. Nous avons opté pour le noir et blanc avec un lavis pour obtenir des gris, pour moi, cela révèle un style et un état d’esprit. On se concentre sur le dessin en ce qu’il a de narratif, sans artifice de séduction. Cela me permet de davantage me concentrer sur le contenu graphique, de m’attarder sur des détails. Je dessine avec des plumes de goéland que je ramasse sur la plage. C’est beaucoup plus souple, mais il m’en faut beaucoup car elles s’usent très vite. Je n’utilise la plume métallique que pour les textes, et le pinceau pour les lavis. »
Comment avez-vous construit votre histoire ?
« J’écris d’abord, puis je travaille des mois avant de montrer mon projet. Le retour de mon éditeur a été très constructif, je me retrouve bien dans ce livre. Je suis parti d’un fait divers qui m’avait particulièrement marqué pour construire une fiction. Je suis parti dans le Limousin que je ne connaissais pas, je cherchais un lieu de passage. Et j’ai été intrigué et séduit par la commune de Magna-l’étrange, ça m’a parlé. J’ai reconsidéré mon histoire pour qu’elle puisse s’y dérouler. »
Vous pourriez en imaginer une qui se déroule en bords de Loire ?
« Tout à fait, je suis arrivé à Langeais il y a 4 ans, avec l’envie de quitter la Normandie, d’être proche de Tours qui est une ville attractive, bien située. Et la Touraine m’a séduit. Je suis arrivé tôt ce matin à Blois pour me promener en ville, ce patrimoine pour moi qui vient d’une région où tout a été démoli, c’est magique. Et avoir un festival de cette qualité, à la porte de chez soi, c’est une grande chance. J’aime beaucoup le terroir français, les régions un peu reculées dont on ne parle pas beaucoup en BD. Je trouve qu’il y a beaucoup à leur faire dire. »
Comment vivez-vous votre métier de jeune auteur ?
« C’est un peu l’aventure ! Je fais des petits contrats d’édition, mais je veux me donner essentiellement à mes projets personnels. Faire de la BD sérieusement, c’est s’y donner à temps plein. Il faut battre le fer tant qu’il est encore chaud, tant que l’envie est encore là. Chaque projet demande du temps et je ne veux pas arriver au bout épuisé. Mon plaisir, je le trouve dans la mise en scène, que je remets complètement en question à chaque nouvelle histoire. J’ai envie d’explorer toutes les pistes possibles, même si c’est dans un même univers. Je suis en train d’encrer des pages d’un récit de voyage en Chine conçu à deux auteurs, où nous avons croisé nos regards. Mais on ne sait pas si on trouvera un éditeur ! J’ai un album personnel qui est en passe d’être publié, mais La boîte à bulles me demande d’importants changements de rythme. Il faut que je prenne un nécessaire recul avant de m’y remettre et qu’il puisse sortir. »
Propos recueillis par Béatrice Bossard
- Intrus à l’étrange
- Auteur : Simon Hureau
- Editeur : La Boîte à bulles
- Prix : 24 €
- Sortie : le 3 juin 2011
- Le prix Nouvelle République distingue, depuis 1995, un auteur de la région de la zone de diffusion du quotidien.