Voilà, c’est arrivé. La France est dingo des pandas. Evidemment la Nouvelle République peut être fière d’avoir sur son territoire le parc animalier qui accueille, dorlote, nourrit et titille la libido de nos deux héros en peluche. Mais quand on lui murmure à l’oreille le mot « panda », l’oncle Erwann se dit : autant en parler tout de suite.
Réflexe BD : c’est quoi LA bande dessinée qui rime avec panda ?
Gagné : c’est Panda. Jamais entendu causer ! Normal, c’est vieux comme les histoires de l’oncle Erwann. Première apparition en France en 1949, disparition quelque part dans les années 1966-67 sauf chez les Chtis où il a survécu en grignotant du papier journal.
Mais une petite graine de bambou ayant germé, un drôle d’animal nommé Tignous, a relancé l’année dernière l’existence du nounours noir et blanc. Allez, on vous raconte tout ça… mais on ne vous parlera pas du Kung Fu Panda, les images qui bougent, c’est pas ce rayon-là, voyez plus loin, Madame Michu.
Une première histoire hollandaise
Il y a parfois des logiques implacables. Après deux longs chapitres consacrés à Marten Toonder, les fans de Case Départ espéraient peut-être passer à autre chose. Raté. L’unique bande dessinée mettant en scène un panda est signée… Marten Toonder. Enfin des studios Marten Toonder. Le maître y aurait mis sa griffe mais pas souvent.
Ce nouvel héros made in Holland naît peu après Tom Pouce, en décembre 1946 dans les colonnes d’un journal de La Haye. Comme le petit chat blanc, le panda nommé Panda est gentil tout plein, noir et blanc comme il se doit, se tenant lui aussi debout et pas plus habillé que son « grand frère « félin ». Le Panda toonderien*est entouré de deux amis : le renard gentleman-escroc du nom de Georges Bongarçon et d’un cocker majordome appellé Jérémie Jolicoeur.
Pour sa distribution en France, c’est encore le talent de vendeur de M. de Zwaan qui va faire merveille.
Pas en Touraine, cette fois, mais dans le Nord : la Voix du Nord va en effet battre avec cette bande quotidienne des records de longévité (c’est incroyable ce que Toonder aura marqué la PQR sans que personne aujourd’hui ne s’en souvienne !). Près de quarante ans de publication entre 1949 et 1988 ! Mais on la retrouvera aussi à l’est, dans le Républicain Lorrain (de 1951 à 1966 : ça fait aussi un joli bail) à l’ouest, dans La Dépêche d’Evreux (1949-1967) et au centre dans La dépêche de Saint-Etienne (1950-1965).
Pour les collectionneurs, même si le BDM n’est pas très généreux, les éditions Artima (Art et Images, de Roubaix) ont sorti dix-huit fascicules de récits complets entre 1957 et 1959. Le premier s’appelle Le Virtuose, le dernier Le maître archéologue. Allez, 300 euros la série intégrale, il ne doit plus en exister beaucoup. Objet de curiosité : sa mise en bulles, alors que l’original se présente avec du texte sous l’image, comme Monsieur Bommel dans la Nouvelle République.
Autre objet collector, l’unique album cartonné : Panda et le maître aviateur, publié par le journal La Libre Belgique en 1949…
Pour en savoir davantage, comme d’habitude le site www.Pressibus.org (chapitre Toonder, évidemment) et le site de raymond, qui lit beaucoup. Et tous les sites néerlandais of course.
* Pour faire savant : les différents dessinateurs au service de Panda ont été Harry Hargreaves, Jan Van Haasteren, Richard Klokkers ou B.J. Van Voorn. Et d’autres probablement.
Une deuxième histoire française
En janvier 2010, Tignous (de son vrai nom Bernard Verlhac) caricaturiste de Charlie Hebdo, de Marianne, de Fluide Glacial, etc, après une couverture journalistico-dessinée du procès Colonna qui fera beaucoup de bruit, se lance aux côtés du World Wide Fund (WWF) dans la défense désespérée des pandas.
Son Pandas dans la brume (référence pour ceux qui n’en auraient pas aux Gorilles dans la brume de Diane Fossett) dépasse évidemment le simple cadre des petits plantigrades menacés de disparition.
Le Tignous, ce n’est pas simplement un trait acide et efficace, c’est surtout, derrière l’humour, un regard pas très tendre sur une société qui ne l’est pas vraiment*. Comme quoi sous la diplomatie de la peluche (superbe expression d’un journaliste de la NR), se cachent – mal – des réalités bien moins douces. (Lire son interview juste après la sortie de la BD, en avril 2010 sur le site de la WWF)
Allons, tout ceci n’est pas grave : ils tapent sur les bambous et sont n°1. Philip Lavil a bien raison. Sauf que les pandas, y sont mignons, mignons, mignons (autre référence mais celle-là assez border line) et on ira les voir croquer leurs bambous dans leur nouvelle vie. Leur famille habite dans le Loir-et-Cher….
* (Pandas dans la brume. De Tignous. Ed. Glénat Drugtsore. 64 pages. 13,90 euros)
NdOE (note de l’Oncle Erwann) : Bien entendu, Case Départ est prêt à référencer toute autre existence de pandas en BD. Avec plaisir.