Le 26 avril 1986, le plus grave accident nucléaire du vingtième siècle se produit à Tchernobyl, en Ukraine.
Ce jour-là, le coeur de la centrale Lénine, « orgueil de la technologie soviétique » inaugurée seulement deux ans auparavant, commence à fondre. Un nuage invisible et inodore chargé de radionucléides parcourt des milliers de kilomètres. La catastrophe va faire des milliers de victimes. Certains pays, comme la France, minimisent les faits jusqu’à nier l’incursion du nuage sur notre territoire…
L’Union soviétique appelle à l’aide et mobilise des centaines de milliers de personnes pour évacuer et nettoyer la zone. Entre 500.000 et 800.000 liquidateurs vont parti- ciper à cette tâche… Selon l’OMS, cinq millions de personnes seraient aujourd’hui contaminées par les radionucléides. Des organisations non gouvernementales avancent le chiffre de 25.000 à 100.000 morts. Selon l’académie des sciences de New- York, la pollution durable due à l’accident aurait provoqué la mort de près d’un million de personnes sur toute la planète entre 1986 et 2004…
Trouver du beau dans l’horreur
Toutes ces données, et bien d’autres, se trouvent dans Un printemps à Tchernobyl, le formidable roman graphique et documentaire d’Emmanuel Lepage, paru récemment chez Futuropolis.
A l’époque des faits, l’auteur a 19 ans. Il regarde, écoute, enregistre. Vingt-deux ans plus tard, en avril 2008, il va se rendre sur place afin de réaliser un carnet de voyage pour le compte de l’association Dessin’acteurs.
C’est dans le village de Volodarka, à 20 km de la zone interdite, qu’il passera deux semaines et en rapportera deux ouvrages, Fleurs de Tchernobyl et ce magnifique Printemps à Tchernobyl.
Il s’agit ici d’un véritable documentaire. En 164 pages, le scénariste et dessinateur nous fait part de ses doutes et de ses découvertes. Il évolue d’abord un décor grisâtre, fantomatique, dans une ville dévastée et désertée, où seuls les « tic tac » du dosimètre rythment les pas des rares visiteurs.
Mais bientôt ces derniers s’aperçoivent d’autre chose. La vie et la nature ont peu à peu repris leurs droits, la chaleur et l’envie de vivre de ceux qui sont malgré tout restés vivre sur ces territoires vont changer la vision de l’auteur.
Venu sur place pour dénoncer et pointer les dangers du nucléaire, il va aussi se mettre à apprécier la beauté de paysages rendus à la vie sauvage. Les couleurs apparaissent alors petit à petit.
Sur des doubles pages, le talent graphique d’Emmanuel Lepage s’exprime à plein. La force du fusain, des crayons gras et de l’aquarelle donnent ici toute leur mesure.
Sur ces terres interdites où la mort a longtemps rôdé, le dessinateur a (re)découvert la vie. Ce livre est beau, très beau. C’est un véritable plaisir de lecture que nous propose Emmanuel Lepage. Son propos simple et humaniste nous invite aussi à porter un autre regard sur ce qui reste malgré tout une des grandes tragédies du vingtième siècle.
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Un Printemps à Tchernobyl
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Auteur: Emmanuel Lepage (scénario, dessin et couleurs)
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Editeur: Futuropolis
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Sortie: octobre 2012Prix: 24, 50 €