Qu’est-ce qu’un skinhead ? Quelles sont ses motivations ? Quelle est son idéologie ? Comment entre-t-on dans cette mouvance ? Ces questions, David Cenou a essayé d’y répondre dans Mirador, tête de mort.
Ce récit autobiographique met en scène Sam, jeune skin qui est mêlé avec sa bande au meutre d’un homme. Dans ce troublant mais néanmoins sublime album, l’auteur décrit la vie de son personnage, de son embrigadement dans le mouvement à son incarcération en prison, en passant par les bagarres, les défilés Front National du 1er mai ou la création d’un bar communautaire.
«Trop d’alcool… trop de temps passé ensemble… trop de bourrage de crâne, trop de bastons… trop de fascination et de fétichisme dans notre façon de vivre pour avoir, à ce moment là… une réflexion objective et sensée sur nos agissements. »
Lendemain de fête, quelque part dans Bordeaux. Sam, Doc Marteens aux pieds et Bomber sur le dos émerge de son sommeil de cuite. Au téléphone Mélanie lui demande de venir avec elle, au poste de police pour témoigner au bénéfice de Romain, déjà en garde à vue.
Sam est aussitôt mis lui-même en garde à vue : un homme est mort, hier soir et sa bande de skinhead semble être à l’origine du drame. Lui, Sam, ne se souvient pas de ce qu’il s’est passé la veille. Alors il se remémore ses dernières années, « l’histoire de ma descente dans les recoins glauques de la vie où j’aurais pu perdre au moins la raison ».
A son retour de l’ex-Yougoslavie, Sam avait retrouvé sa bande de potes, celle avec laquelle il jouait dans les concerts skinheads ou débarquait à Paris pour célébrer le 1er mai aux côtés du Front National.
Sans artifice, David Cenou livre un véritable témoignage sur cet univers méconnu des skinheads. Album sombre et authentique, il est très critique face à son passé. Il ne néglige rien, ni la violence faite aux femmes de skins, ni les accointances avec le FN ou le MNR de Bruno Mégret et ni les liens tissés avec les autres groupuscules français et étrangers. Il souligne un fait important, si lorsqu’ils sont en meute, les skins n’ont peur de rien ; lorsqu’il est seul, Sam le héros, est un lâche.
Graphiquement le lavis en noir et blanc sied parfaitement avec le côté sombre du récit. David Cenou a éprouvé beaucoup de difficultés pour sortir de ce milieu mais aussi à chasser de son esprit, ces idées nauséabondes. Ce long chemin est désormais derrière lui et il a retrouvé une vie équilibrée. Actuellement aide-soignant, il prouve par Mirador, tête de mort, qu’il est un auteur complet de bande dessinée. Ce premier album fort et glaçant, ne laissera pas le lectorat indifférent.
La ligne éditoriale de la maison d’édition La boîte à Bulles et plus particulièrement la collection Contre-Coeur sont une réussite. Case Départ vous a déjà parlé de façon enthousiaste de (A)mère et de Ainsi se tut Zarathoustra qui font parti de cette belle collection.
- Mirador, tête de mort
- Auteur : David Cenou
- Editeur: La Boîte à Bulles
- Prix: 16 €
- Sortie: mai 2013
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