Le mercredi 26 août 1914
Réveil à 4 h. Nous quittons immédiatement Danvillers et nous nous éloignons de l’ennemi. Nous passons auprès d’une batterie de 75 qui s’enterre le long de la route. Nous passons à Réville, Sivry-sur-Meuse. Nous traversons à cet endroit le Canal, la Meuse et la ligne du chemin de fer de Verdun à Stenay. Les mineurs du 1er Génie sont en train de miner les ponts du Canal et de la Meuse pour les faire sauter et retarder la marche de l’ennemi. Nous apprenons que les Allemands avancent partout.
Après avoir passé la ligne du chemin de fer nous passons à Dannevoux, Gercourt, Septsarges, Cuisy, Malancourt. Nous faisons la grand-halte à Septsarges, dans les prés. Nous n’avons pas touché de vivres depuis 24 heures. Nous mangeons des carottes et des navets crus. Il est impossible de se procurer des aliments chez les habitants. A la grand-halte nous faisons seulement du café et nous mangeons du « singe » froid, et sans pain. Nous passons à l’est de Montfaucon et tout auprès et nous nous dirigeons sur Malancourt où nous passons à la tombée de la nuit. Le village est rempli de soldats. Nous continuons notre marche et nous arrivons à Haucourt à 20 h, après avoir traversé un ravin assez profond. Nous avons marché une grande partie de la journée et fait environ 44 km par une grande chaleur. Auprès de Montfaucon, nous avons rencontré des autobus de Paris, transformés en voitures à viande. Nous n’avons pas eu à combattre et nous nous éloignons de la ligne de feu. Nous touchons nos vivres à 21 h, et nous les faisons cuire dans la maison où nous sommes cantonnés, chez une fermière qui nous fait tous manger dans l’intérieur de la maison. La pluie commence à tomber, et continue une partie de la nuit. Je couche dans une grange sur des gerbes de blé. La journée a été très dure et nous sommes tous épuisés. Nous avons aussi beaucoup souffert de la soif.