14 octobre 1914.
J’ai un nouveau cheval. C’est une grande joie. Un beau cheval tout blanc, et qui fut le cheval du général Pau. Je l’ai baptisé Altkirch, naturellement. Quand il voit des pantalons rouges il s’élance vers eux d’un élan superbe. Tout le monde dans le pays le connaît : il était soigné par un homme d’ici pour une synovite. Les gamins s’arrêtent étonnés de me voir sur « le cheval du général Pau ». Et cet après-midi durant un match que je disputais sur Altkirch contre le cheval allemand du capitaine Lefolcalvez j’avais pour moi la foule et j’eus aussi la victoire.
Comme la Lorraine m’a tout de suite séduit ! Comme j’aime les collines mosellanes, avec leurs vignes, leurs petits villages nichés dans des creux, leurs routes bordées de peupliers ! Florémont, Ubexy, Bouxurulles !… Déjà je suis l’ami de vos clochers et le calme de vos campagnes me fait oublier la guerre.
Effectivement, on voit le général Pau sur une photo de l’époque, montant ce beau cheval blanc. Un cheval d’officier général important pour un médecin lieutenant, cela a dû naturellement susciter quelques jalousies…
Maurice Bedel a dû » toucher » ce bel animal lorsque l’armée d’Alsace que commandait Paul Pau a été dissoute par Joffre, après ses déboires militaires.
Voilà maintenant notre héros séduit par la Lorraine comme il a avait été séduit pas les Vosges, ce n’est plus la guerre, mais un véritable circuit touristique !
Enfin et c’est heureux, il prend les choses du bon côté et garde sa joie de vivre, c’est important dans les actions de guerre.