20 février 1915 : combien de maisons sont vides d’hommes

Le samedi 20 février 1915
Mon bataillon quitte les tranchées de l’Etoile de Bolante à 6 h et est remplacé par le 113ème de ligne. Nous venons à la Pierre-Croisée où nous avons repos toute la journée. Je vois M. Proust, E. Bourreau, Morisseau. Nous avons enterré sur le plateau de Bolante plusieurs tués de la compagnie et plusieurs Allemands qui avaient été tués le 16. Deux Allemands avaient été écrasés auprès d’une tranchée par la chute d’un gros chêne qu’un obus avait coupé. Nous les avons dégagés et enterrés. Nous trouvons dans leurs musettes du pain qui est presque noir et très mauvais.

Le samedi 20 février 1915 – 16 heures.
Ma chère Eugénie,
J’ai reçu ce matin ta lettre datée du 14 février. Tu me dis que tu n’as pas reçu de mes nouvelles depuis plusieurs jours, mais comme je t’ai écrit presque tous les jours tu dois en avoir reçu depuis. Je me porte bien, et je te remercie des vœux de bonne santé que tu m’adresses.

Le temps est toujours humide, les chemins mauvais et les balles nombreuses ; toutes sortes de mauvaises choses, quoi.

Auguste Travaillé est revenu à mon escouade, il y a trois jours, il est complètement rétabli.

J’ai vu aujourd’hui Bourreau, Proust, Morisseau de Marcé. Nous sommes heureux de nous revoir et de causer de Bourgueil.

Tu es heureuse, en effet de conserver auprès de toi Georges père et fils. Combien de maisons sont vides d’hommes.

Je te souhaite bonne santé et t’embrasse de tout mon cœur.