18 mars 1915. Wargemoulin
Il tombe de gros obus. Il passe des blessés par petits paquets lamentables. Des zouaves auto-mutilés, sinistres arsouilles qui ne savent même pas mentir. Il en arrive trois ensemble : ils me content qu’ils se sont perdus dans les boyaux après avoir été blessés et qu’ils n’ont pu trouver Mesnil-les-Hurlus. L’un a la main gauche traversée d’une balle tirée à bout portant, il balbutie, se trouble et devient vert quand je lui annonce qu’il va être fusillé, vont être également fusillés les deux autres : l’un a l’index gauche sauté d’un coup de feu. L’autre, plus ingénieux, s’est fait donner par un camarade des coups de baïonnette dans le dos, le bras et le front. Ensuite il s’est couvert le visage de boue. Il ne peut dire d’où lui sont venus ces coups : peut-être des balles, peut-être des éclats… Mais il oublie de parler de baïonnette. Triste, triste…
Aujourd’hui le régiment n’a pas été engagé. Mais beaucoup de victimes du bombardement intense des boyaux.
Le colonel est satisfait.*