Le mardi 27 avril 1915
Aménagement de la tranchée, abris, banquettes, créneaux, etc… je vais au petit poste en me promenant dans l’après-midi.
CARTE-LETTRE gommée trois côtés — 9 drapeaux dans un écusson à trois bandes et bandeau » Gloire aux alliés »
Le mardi 27 avril 1915 ‑ 11 heures
Chère Eugénie,
Aujourd’hui deuxième jour de tranchée ; deuxième jour que nous sommes revenus auprès du canon.
J’étais de veille la nuit dernière de 11 h du soir à 2 h du matin et de 4 à 6 h.
Quoique nous soyons mal couchés dans des cabanes sous terre, ce n’est pas amusant de se lever en plein sommeil et deux fois par nuit. Moi qui avais de la peine à me lever à 6 heures chez nous, je suis bien obligé de me lever, et cela depuis bientôt neuf mois. Ca va m’habituer à être matinal.
Je me porte très bien le temps est beau. Il a fait un peu d’orage hier soir. C’est la deuxième fois que je l’entends depuis la guerre.
Je t’embrasse de tout mon cœur. – Ton frère, – H Moisy
Le mercredi 28 avril 1915
Nous pouvons aller le jour au ruisseau La Cheppe qui se trouve entre les deux lignes, pour chercher de l’eau et faire notre toilette. Le taillis est assez épais pour nous cacher. Au petit poste et sur toute la cote 263 tout le bois est broyé au ras du sol. Nous continuons à aménager notre tranchée, il y a toujours à faire pour l’entretenir en bon état. Le sergent Fouquet a fait une patrouille à 20 h. Le commandant Laclotte, du 2ème bataillon, a visité les tranchées. Vu aéroplanes français et allemands.
Le jeudi 29 avril 1915
Le secteur est très calme depuis quatre jours, pas de fusillade. La nuit, c’est le silence absolu. Dans le jour, canonnade et lancement de crapouillots. Le sergent Eymain fait une patrouille. Un aéroplane français est passé en pleine nuit au-dessus des lignes. On entend des cris la nuit sur la cote 263, sans doute une patrouille qui a été surprise. Le temps est très beau depuis plusieurs jours. Les nuits sont tellement calmes que l’on entend le bruit d’une chute d’eau de l’Aire dans Boureuilles.
Le jeudi 29 avril 1915
Mon cher père,
Comme je tiens à donner de mes nouvelles tous les jours je vous écris aujourd’hui, ayant écrit hier à Eugénie.
C’est vraiment dommage d’être à la guerre d’un si beau temps. Il fait un si beau temps que l’on pourrait se mettre pieds-nus. La nuit il ne fait pas plus froid que dans la journée. Cette nuit le sergent qui veille la nuit avec moi ayant été faire une patrouille, j’ai veillé de six heures du soir à 2 heures du matin, je dormais tout debout malgré moi.
Tout est calme par ici, je n’ai jamais vu des nuits aussi calmes, à peine si nous entendons 100 coups de fusil par nuit. C’est à se demander ce qu’il y a là‑dessous.
Les aéroplanes français et allemands passent continuellement au-dessus de nos têtes.
Je me porte bien.
Recevez l’expression de ma plus vive affection.
Votre fils qui vous aime ‑ H. Moisy
Le vendredi 30 avril 1915
Journée très calme. Vu aéros et Taubes. Le sergent Cruchet fait une patrouille avec un fusil de chasse à deux coups. Il a fait de l’orage.