7 avril 1916.
Clair de lune de guerre. Mon lac est un fjord blotti dans les flancs sauvages des Spitzenkoffe. Un grand-duc hulule dans le silence des ravins. Ce grand-duc est déjà de mes amis, de mes vieilles habitudes depuis trois nuits il meuble mes rêves. A Metzeral, qui se recroqueville dans ses ruines, les sentinelles ponctuent leur angoisse d’un coup de feu. De temps en temps une fusée monte et son éclat éclipse celui de la lune. Nuits de guerre, nuits d’Alsace !… Les squelettes de la cote 830, dont l’affreuse odeur arrive par bouffées jusqu’à ma lucarne, les squelettes de la cote 830 dansent-ils quelque danse de Dürer ?*