28 janvier 1917. Aïn Leuh
Non vraiment, le déluge ça ne devait pas être gai. Et pourtant, il avait une barque, Noé. Comment notre maison sénégalaise résistera-t-elle à l’assaut du vent et de la pluie ?
14h
Brrrooum !…
Hein ? Quoi ? Que se passe-t-il ? Oh !peu de choses, la moitié de la façade de ma chambre vient de s’écrouler… Il pleut à torrents, neige fondue, pluie, grêle. On accourt à mon secours ; de Marignan sourit, le cigare à la bouche et prend des mesures. Une section de tirailleurs va dresser contre cette façade béante un mur en pierres sèches. Aussitôt fait. Mes pauvres bougres, dans la pluie qui les cingle, dans la boue qui les englue, apportent une par une les pierres d’une baraque voisine, naguère écroulée, elle aussi. Marignan et moi, mettons carrément les mains à la pâte et comme nous sommes aussi maladroits l’un que l’autre, nous nous écrasons, nous nous écorchons les doigts. Deux de mes manteaux, mes bottes, sont successivement traversés par la pluie. Enfin à 16h, la brèche est bouchée à peu près et je puis reprendre ma lecture interrompue du Décaméron.
16h35
Patatatras !… Broum ! Broum ! Broououm !!…
C’est grave ?
Toute la façade des chambres de Marignan, Saddoud, Pinelli, s’est abattue.
C’est l’irréparable désastre. Je me précipite. Je vois apparaître entre deux moellons le cigare et le sourire de Marignan. Il escalade son mur pour sortir de sa chambre. A mon tour de prendre des mesures. Je file chez notre voisin le commandant Blondiau, des tirailleurs algériens, et je lui demande l’hospitalité pour la nuit. Il me l’offre spontanément au récit de nos malheurs, et sous des torrents d’eau nos ordonnances transportent lits, couvertures et cantines, dans une petite pièce qui a un toit et des murs solides. Nous passerons la nuit là, de Marignan et moi.
pas simple la vie à Aïn Leuh quand il pleut à torrents de la neige fondue…
Sûr que ce n’est pas vraiment le Clubmed au niveau confort…
Comment ne pas tomber gravement malade dans ces conditions ?
Il faut avoir une très solide constitution..