12 mars 1916. Cet après-midi le bombardement a repris

12 mars 1916.

Cet après-midi le bombardement a repris pendant une relève des bataillons de chasseurs. Les points de chute des obus de 150 d’aujourd’hui sont marqués au crayon.

Pendant ce marmitage, les alpins du 63^ème bataillon donnaient un concert au Collet, à deux kilomètres en arrière. Par ce beau soleil, les troupiers étaient venus flâner là, des traîneaux, des skieurs, des autos passaient… C’était comme la fête du village. Mais quand il fallut que les artilleurs de ma batterie prissent le chemin du retour ce fut autre chose : la route était barrée à la Schlucht par le marmitage. Il y a des calculs et des hésitations bien amusants quand il s’agit de franchir un tel barrage. D’abord on attend que quatre ou cinq obus soient tombés afin d’établir la régularité de leurs arrivées. Si deux minutes s’écoulent entre deux éclatements on en conclut qu’on a deux minutes pour franchir la zone dangereuse. Au pas gymnastique, de la gare française à l’embranchement de notre sentier avec le chemin du Taneck, on a tout juste le temps. De 16h à 18h il fallait « faire vite », la fréquence oscillant entre une minute et demie et quatre minutes. Ah !il n’y avait pas de flâneurs à la Schlucht par cette belle fin d’après-midi. Il n’y a eu d’ailleurs qu’un seul blessé, un des fantassins de Charnot, blessé d’un éclat à la joue. La plupart des obus sont tombés sur le talus au-dessous de la villa Hartmann. L’un d’eux est arrivé, sans éclater, auprès de la gare française au moment où les capitaines Jeansolen et Guillevic passaient là en traîneau.

Ce soir, nous sommes allés, le commandant Delamare, Bréhier et moi prendre une coupe de champagne à la villa Hartmann que le commandant Florence quitte demain pour les environs de Thann. Toasts, trinqueries (sic), pointes d’émotion…*