Devant la cheminée du salon de Nathalie, il y a une contrebasse qui se languit sur son support, et un gars qui visse, pose, déplace tout un tas de choses autour de lui.
« Bienvenue dans notre musique de salon, accueille à l’entrée Sébastien Boisseau, installez-vous, prenez un verre le temps que Sylvain ait fini d’installer ses percussions. »
On est une douzaine. Il y a de la quiche, de la tarte aux poireaux, du saucisson et du gâteau au chocolat. La Halle aux grains fournit le vin pétillant. Nous sommes dans l’une des 17 soirées « Musique de salon » que la scène nationale de Blois a décidé de mettre à son programme cette saison.
Des soirées chez l’habitant, avec Sébastien Boisseau, contrebassiste et inventeur du concept, et un autre musicien, à chaque fois différent, à chaque fois pour une même cause : faire découvrir la musique improvisée à un public qui n’en a le plus souvent jamais entendu parler. (>> Genèse du concept à lire ici)
Ce samedi soir au bord du Cosson, je découvre Sylvain Lemêtre, percussionniste éclectique, nourri de musique contemporaine autant que de tambours cubains, et familier de l’improvisation aux frontières du jazz. Sébastien Boisseau, je le connais déjà pour l’avoir apprécié sur scène avec le quartet Jass notamment, et avec l’album Wood, un duo avec Mathieu Donarier.
Ce n’est pas le cas des invités du soir, qui ne savent pas à quoi s’attendre.
Le premier morceau déconcerte l’assemblée. Sébastien Boisseau lance les échanges. Est-ce une musique structurée ? Ecrite et répétée ? Y a-t-il une part improvisée ? Les avis divergent mais sans vraiment s’opposer, la réflexion se fait peu à peu collective sous les sollicitations bienveillantes du contrebassiste, qui prend garde à n’user d’aucun mot savant, d’aucun jugement. Mais qui pousse chacun, encore un peu plus loin, dans l’expression de son ressenti, de ses hypothèses…
Avant que finalement, l’évidence ne finisse par être formulée par une participante, osant exprimer l’idée peu à peu partagée par l’assemblée, que cette musique était totalement improvisée. Sans en avoir parlé avant, sans s’être mis d’accord, sans l’avoir déjà fait.
Alors, la discussion s’ouvre, sur le « comment ? », qui nous tiendra tous en haleine le reste de la soirée… Jusqu’à la troisième et dernière improvisation, illuminée par un je ne sais quoi de plus que les deux précédentes, qui fait venir le sourire aux lèvres des musiciens et donne le sentiment aux invités d’avoir partagé avec eux, et entre eux, un moment privilégié.
Auront-ils la curiosité d’aller plus loin dans la découverte des musiques improvisées ?
Depuis que Sébastien Boisseau a imaginé cette « Musique de salon », il a rencontré près de 2.000 personnes dans ces conditions. La jauge d’une belle salle de concert, sauf que ces 2.000 là n’en auraient jamais poussé la porte. Bravo maestro.
Bonus
Une improvisation de Sébastien Boisseau avec Mathieu Donarier :
Un extrait du programme solo de Sylvain Lemêtre, qui m’a personnellement donné très envie de découvrir la musique contemporaine !