Comme de nombreux media en ligne, nous nous pausons à la Nouvelle République la question de la monétisation de l’audience.
Parmi les réponses possibles le Paywall semble progressivement faire ses preuves. Le NYTimes change aujourd’hui les critères de cette fonction sur son site.
En fin d’année dernière, le NYTimes dressait un bilan plutôt positif.
Lancé le 28 mars 2011, le Paywall est un système de paiement à la consommation assez complexe en apparence. Pour l’essentiel, les internautes consomment 20 articles par mois sur le site gratuitement et/ou 5 articles par jour depuis google. La consommation depuis les réseaux sociaux est, elle, illimitée. A la complexité apparente, je préfère une lecture plus optimiste : cette offre permet d’instaurer un accès payant pour les consommateurs réguliers du site. Les autres formes d’accès au site – le référencement naturel via google ou le référencement social via Twitter ou Facebook – sont ménagés permettant au site de faire croitre son audience, d’assurer la livraison des engagements publicitaires et de compléter ses revenus avec ce nouveau modèle économique.
En quoi la considération d’un système de monétisation de l’audience est-elle complexe ?
L’essentiel des revenus d’un site comme le NYT ou www.lanouvellerepublique.fr est publicitaire. Sans rentrer dans le détail des offres et pour simplifier le propos : les pages vues permettent de distribuer des stocks d’encarts publicitaires, monétisés auprès des annonceurs et des partenaires locaux. La valeur du stock publicitaire augmente s’il permet d’adresser une cible, par exemple les habitants de Tours ou de NewYork, les passionnés de jardinage ou d’économie.
Le cercle vertueux est assez simple : plus le site a d’audience, plus il est considéré par les annonceurs, meilleure est sa commercialisation, le préalable étant sa capacité à distribuer les espaces vendus.
Pour capitaliser cette audience, le site bénéficie :
- de sa notoriété, qui représente une part importante des accès au site, notamment pour les marques fortes localement comme la NR ou le NYT. Ces requêtes sont directement saisies dans google (ex : NYT, NRCO, NR, etc.);
- le contenu publié chaque jour est une source très intéressante de référencement dit « naturel ». Google ou Bing analysant régulièrement les sites, ils indexent les articles et les classent en fonction de nombreux critères. Ainsi un lecteur tapant « présidentielles 2012″ pourrait via google être conduit sur la NR sans connaître le journal. Cette audience plus opportuniste – et moins fidèle – représente une part importante du lectorat.
- selon le même principe, les articles peuvent être référencés sur les réseaux sociaux comme facebook ou twitter.
Ces deux derniers moyens d’accès au site représentent plus de 50% de l’audience, on comprend alors aisément que rendre les contenus payants peut impacter théoriquement plus de la moitié de l’audience du site, le privant de référencement naturel et de référencement social.
Il vient assez naturellement dans la progression de la réflexion un argument qui paraît simple : rendre payant une partie du contenu, celui à plus forte valeur ajoutée, celui difficile à trouver sur des sites concurrents. Cette idée semble un excellent compromis, la part de contenu resté gratuit garantissant toutes les formes de référencement. D’un point de vue marketing cette position semble assez justifiée.
Cette solution, séduisante de prime abord, est dangereuse, en partciulier pour les sites locaux comme la NR ou – toute proportion gardée – le NYT. En devenant payant ces contenus sont moins visités (une division de l’audience par 10 est généralement constatée). Les stocks d’encarts publicitaires associés à ces contenus ne peuvent plus être écoulés et le chiffre d’affaires est en péril. Ces stocks représentant à volume identique, un chiffre d’affaires plus important que les autres parties du site – le prix de l’encart étant plus élevé -, c’est un risque majeur. De surcroît, la tentation est grande de compenser la perte d’audience naturelle par du référencement payant, ce qui naturellement déséquilibre un business modèle déjà bien fragile.
Autres considérations complémentaires, l’internaute vient il pour le contenu dit « à forte valeur ajoutée » pour ensuite consommer le reste du contenu ? le contraire ? un mixe des deux ? En conséquence quel impact sur le parcours de l’internaute ? on voit bien que cette réflexion est sans fin, seule certitude, la division par 10 de l’audience du contenu devenu payant.
Le Paywall semble limiter ces risques et par extension, apparaît comme La Solution. La nature des contenus n’est pas considérée, seule le volume d’articles lus reste un critère.
Le Paywall induit-il une baisse d’audience ?
A cette question posée lors d’une conférence au congrès mondial de la presse à Vienne, le Directeur Adjoint de la Rédaction du NYT Jim Roberts répondait que l’introduction de cette forme de « péage » n’avait pas provoqué de chute de l’audience.
Le classement des dix sites de journaux les plus visités compte :
- 6 américains : le NYT avec 45 millions de VU par mois (chiffres comscore déc. 2011), «USA Today», les journaux du groupe Tribune regroupant notamment le «Chicago Tribune» et le «Los Angeles Times», le «Washington Post», le «Wall Street Journal» et Advance, un regroupement d’éditeurs d’informations régionales;
- 2 britanniques : le «Daily Mail» et le «Guardian»;
- 2 chinois : l’agence Chine Nouvelle et le «Quotidien du Peuple».
Le NYT annonce aujourd’hui la réduction du nombre d’articles consommés par mois gratuitement de 20 à 10. Rappelons que 224.000 internautes se sont abonnés au site payant à 15 dollars. 57.000 ont opté pour les éditions numériques sur tablettes et mobiles à 35 dollars. Un total de 281.000 abonnements auxquels s’ajoutent les 756.000 abonnés au papier, qui ont accès aux contenus numériques sans supplément.
Pingback: Pepito Ergo Sum