A Vincennes, les militants socialistes ont la confiance tranquille
Les marathoniens étaient de sortie hier à Paris. En shorts et baskets le matin, transpirant pour les 42,195 kilomètres, en costume, cravate et mocassins l’après-midi, suant pour lever les foules. Nathalie Arthaud au Zénith, Nicolas Sarkozy à la Concorde et François Hollande à Vincennes se sont lancé pour le sprint final, après plusieurs mois de campagne. Les deux derniers se sont toisés par meetings interposés, à 30 minutes de footing l’un de l’autre, affichant étrangement la même jauge de 100.000 participants chacun. A la louche.
« Mathématiquement », c’est dans la poche, affirme tranquillement une militante. Tellement sur d’eux, les tenants du changement, que leur candidat a cru bon de tempérer cette joyeuse assurance. Gare à l’abstention, aux « votes sans lendemain ». Ségolène Royal, qui a essuyé la dernière ratée présidentielle du PS, est passé lui prêter main forte sur le sujet : « Les invisibles deviennent visibles en allant voter ».
Promettant d’aller « jusqu’au bout », François Hollande a juré d’aller « chercher tous les électeurs pour les sortir de leur isolement et de leur repli ». A son service, une armée de « mobilisateurs » lâchés dans les villes et les campagnes pour aller chercher les voix jusque dans les salons. « On a déjà fait 3 millions de portes », exagère ostensiblement Boris, « formateur de mobilisateur ». « On vise 5 millions d’ici dimanche ». Pour ça, ils circulent par petites grappes au milieu des badauds pour les envoyer toquer aux portes. « Il faut en parler autour de vous! ».
Le problème, c’est qu’à Vincennes, certains fêtent déjà la victoire. Sans fanfaronner. Quand on pose la question, ils répondent d’un sourire faussement énigmatique.
« On ne lâche rien »
Mais quand même, ils sont là. « On ne lâche rien ! », plaisante Eric, 42 ans, singeant le slogan cher à Mélenchon. Il l’a vu à la Bastille, comme beaucoup. « Écouter Mélenchon, ça fait du bien, mais je préfère le discours d’Hollande. Là au moins c’est clair, on sait il va », commente Marie-Françoise, 41 ans. « Il a bien recadré les choses sur la manière dont se comporte Sarkozy et sa clique », apprécie Alain, 52 ans. C’est que des « anti-Sarkozy », il y en avait beaucoup. Pas euphorique, juste pressé que ça change. Pour eux aussi, il y avait des tee-shirts, barré d’un « recase toi, pauv’président ».
Dans le parterre, des membres du fan club aussi, arrivés de partout. D’Avignon pour au moins 92 d’entre eux, venus « faire du bruit » pour assourdir la Concorde. De Paris centre pour au moins deux jeunes étudiants en phase d’initiation à la politique, qui ont trouvé Hollande « charismatique ». Les anciens sont moins catégoriques, ils acquiescent poliment mais préfèrent louer le « sérieux » de leur poulain. Ce qu’il attendent, ce n’est pas la victoire en chantant, mais la victoire tout court. « On a trop attendu. 10 ans déjà », compte pour eux « le candidat du changement ».
« On va gagner »
Debout dans la tempête, le capitaine Hollande a levé les bras au ciel, haussé le ton, fustigé le « candidat sortant » – lapsus incantatoire ? Il s’est brisé la voix en menant la charge contre la finance, en appelant la jeunesse, en rayant les inégalités de l’avenir. Enivré de « hourras », de « Hollande président » et de « on va gagner », il a même profité d’une fenêtre météo pour plaisanter un peu. « Ça se réchauffe, remarque François Hollande. même en haut il nous écoute » Rions un peu, on est en famille…
Détendu, parfois souriant, il a refait le « rêve français ». Il « est prêt pour être le candidat du second tour », « prêt pour le changement ». Près de la victoire, prudent tout de même. Mais comme c’est le « rassemblement de l’envie de gagner », dixit l’inséparable Manuel Valls, il faut leur en « donner pour leur déplacement », aux militants. La plupart, ils sont repartis contents.