Encore un premier roman ? Et pourquoi pas. Les derniers exemples étaient plutôt intéressants. Continuons ! Cette fois, nous suivons Yassaman Montazami,auteure de « Le meilleur des jours », publié chez Sabine Wespieser éditeur, cette maison d’édition indépendante qui, depuis, dix ans, s’est construit un intéressant catalogue.
Yassaman Montazami, qui vit en France depuis 1974, est née à Téhéran en 1971. Docteur en psychologie, elle a travaillé de nombreuses années auprès de réfugiés politiques et a enseigné à l’université Paris VII. Elle exerce actuellement en milieu hospitalier.
Dans « Le meilleur des jours », elle raconte la vie d’un personnage de fiction fortement inspiré par son propre père, Behrouz, ce qui signifie « le meilleur des jours », en persan. D’où le titre de ce court roman.
Behrouz, c’est un enfant né prématurément dans une famille d’Iran cossue. Behrouz, cet éternel étudiant, adulé par sa mère. Un intellectuel fantasque mais fragile assez éloigné des contingences du quotidien.
La preuve ? Il n’a jamais travaillé, entretenu jusqu’à la fin par l’argent de sa mère. Un point commun qu’il partageait avec le personnage de sa thèse jamais achevée, Karl Marx. » Les vrais révolutionnaires ne travaillent pas », affirmait mon père. Cet état de fait lui paraissait logique : on ne pouvait pas oeuvrer à l’abolition du salariat et être salarié – c’était incompatible », écrit l’auteure.
Autre caractéristique de ce personnage atypique : il avait déjà quitté son pays avant la révolution de 1979. C’est de Paris qu’il a vécu le changement de régime et ses dommages collatéraux. Et il en a honte. Pour se racheter, il accueille des réfugiés qu’ils soient militants communistes ou épouse de colonel…
L’auteure évoque le personnage inspiré par son père
Extraits
Page 17 : « A compter de ce jour, convaincue que sa survie dépendrait uniquement des soins qu’elle et elle seule pourrait lui prodiguer, Rosa exerça sur l’enfant une attention de chaque instant, qui ne tarda pas à tourner à la persécution. Elle était littéralement obsédée par les repas du petit, leur confection, leur présentation et, en dernier, lieu, leur ingestion. […] Faire manger son fils était devenu son unique préoccupation ».
Page 51 : « A force d’entendre toutes ces histoires, il m’était apparu qu’un vrai Iranien était nécessairement un fugitif. Aussi m’arrivait-il quelquefois de regretter que nous nous soyons installés en France avant la révolution : nous n’avions pas pu mettre à l’épreuve notre endurance et notre courage – nous connaissions l’exil, mais nous n’avions pas connu l’exode. »
Page 97 : « Le relatif assouplissement politique du régime islamique par suite de l’élection du président réformateur Mohammad Khatami en 1997 fut le première raison pour laquelle, quand il se sépara de ma mère, mon père choisit de retourner en Iran, où il n’avait plus posé les pieds depuis près de vingt ans, plutôt que de rester à Paris, ville qui était en outre irrémédiablement associée à l’échec de son mariage et à celui de sa thèse. Après plusieurs semaines d’insouciance en compagnie de Bibi, dont les élans passionnés l’enivrèrent commun un jeune homme vivant son premier grand amour, il partit à la recherche de ses vieux amis communistes, dont il n’avait cessé, deux décennies durant, de recevoir de tragiques nouvelles : comme il l’aurait été s’il n’avait pas quitté Téhéran six mois avant la Révolution, la plupart avait été arrêtés, emprisonnés et torturés sous l’accusation de faits de subversion, de complot contre l’Etat ou de collusion avec l’étranger. »
Mon avis
Pour tout vous dire, c’est la quatrième de couverture ( on ne se refait pas !) qui m’a donné envie de lire ce premier roman. Un court livre de 138 pages qui ne pas cependant pas laissé de souvenir impérissable. On a du mal à s’attacher aux personnages. Ils manquent peut-être un peu de profondeur. Dommage ! Avec Persepolis, Marjane Satrapi nous avait plongés dans l’Iran en révolution. Là, on l’observe de loin. De Paris. Un bel hommage cependant à celui que l’auteure a chéri tout au long de sa vie. Malgré des faiblesses et ses contradictions.
« Le meilleur des jours », de Yassaman Montazami, Sabine Wespieser éditeur, 15€.