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Tandis que la rentrée littéraire se prépare avec plus de 550 nouveaux romans, je vous livre ici l’un de mes coups de coeur de l’année, à dévorer pendant les vacances ou à l’heure de la pause. Il est signé par Florence Seyvos. Son titre ? « Le garçon incassable », paru aux Editions de l’Olivier. Un livre tout en sensibilité qui a d’ailleurs ravi le public et nombre de critiques.

 

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Florence Seyvos est née à Lyon en 1967 et vit  à Paris. A 20 ans, elle remporte le premier prix d’un concours de nouvelles, puis publie son premier roman pour la jeunesse intitulé « Comme au cinéma » chez Gallimard. Avec « Les Apparitions », paru aux Editions de l’Olivier, elle obtient le prix Goncourt du premier roman et le prix Littéraire de France Télévision. Elle est également l’auteure de « L’Abandon ». Florence Seyvos est également scénariste. Elle a ainsi écrit plusieurs films avec Noémie Lvovsky dont « Camille redouble ».

 

 

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Buster Keaton

 

L’histoire de ce roman ? C’est celle d‘Henri. Un enfant handicapé raconté par celle qui devient sa soeur après l’union de leurs parents. Une narratrice qui établit un parallèle entre ce jeune garçon prognathe, squelettique et équipé d’une mentonnière et L’homme qui ne rit jamais, le comédien Buster Keaton. Et pour cause.

Si Henri ne peut évoluer normalement, coincé dans son corps de guingois, Buster Keaton, lui, a fait de ses chutes et autres cascades sa marque de fabrique. Une histoire née alors qu’il est encore qu’un enfant, quand son père comédien de music-hall le lance sans ménagement à travers la scène, pendant les spectacles.

Comédien burlesque, Buster Keaton se lance dans le cinéma en 1917. Un cinéma muet dans lequel « L’homme qui ne rit jamais », par opposition à Charlie Chaplin, excellera des années durant. Il sera également réalisateur.

A la fin des années 30, sa carrière décline. Il est devenu alcoolique et sa carrière souffre du passage au cinéma parlant. Il recevra cependant un Oscar pour l’ensemble de sa filmographie et entre dans la légende du cinéma.

 

Le roman raconte ses deux destins de garçons cassables sans jamais les faire se croiser cependant.  Quand l’un chute dans la maison ou la rue, l’autre vole sur un plateau de tournage.

La narratrice, qui au début du livre est d’ailleurs venue sur les traces de Buster Keaton aux Etats-Unis, ne juge ni l’histoire de son frère Henri ni celle de l’acteur. Elle met en lumière le destin de gens différents, d’enfants qui jamais ne grandiront comme les autres. Faut-il en rire ? Faut-il en pleurer ? Juste les regarder vivre et les accompagner semble-t-elle nous dire.

Pourtant, l’un comme l’autre ont eu un père qui voulait les changer, les voir évoluer. L’un vers la normalité, l’autre vers le succès et la notoriété.

Extraits

Page 50 : « Buster voit sa mère jouer du saxophone, son père faire des acrobaties très drôles avec une table, et il n’a qu’une envie : s’amuser avec eux. Régulièrement, il fait irruption sur scène en pleine représentation et ses parents sont obligés d’interrompre le spectacle pour le ramener en coulisses. […] Son premier rôle est celui d’une chose. Joe, son père, considère cette chose, la soulève d’une main pour mieux l’examiner, puis la laisse retomber par terre. La chose ne bronche pas. Alors Joe attrape de nouveau la chose et la jette dans le décor. »

Page 96 : « Il lui est même arrivé parfois de voir sa mauvaise appréciation d’une situation redressée par une gifle. Aussi se méfie-t-il comme de la peste de nos tristes nouvelles, de nos accidents et de nos chagrins.

Mais ce jour-là, son père est mort, et c’est cette nouvelle que ma mère est venue lui annoncer. Les mots ont traversé la chambre. Henri a légèrement sursauté.

- Hé bien, dit-il, je n’aimerais pas être à sa place. « 

Page 110 : « J’ai peur qu’on le brutalise, par exemple qui quelqu’un lui adresse la parole et qu’Henri l’ignore, comme il le faut souvent. Quand il prend le train seul, j’ai peur que le train reste bloqué en rase campagne. Ou pire, que le train reste bloqué dans une ville. J’ai peur que son téléphone soit à court de batterie. Que personne ne vienne le chercher sur le quai de la gare.

Mon frère, toi qui peines à enjamber une flaque d’eau, toi pour qui le monde est aussi peu lisible que ce plan que tu tiens à la main, que ferais-tu si tu te perdais encore ? Et que ferais-tu si c’était la guerre ? C’est idiot, si c’était la guerre, nous serions tous perdus, apeurés, sans doute aurais-tu moins peut que nous. Toi qui reçois les mauvaises nouvelles comme de la pluie sur tes chaussures, les brimades comme une rafale de vent sur ton visage.

Mais le chagrin, Henri, où le mets-tu ? Tes yeux ne pleurent jamais. La tristesse semble ricocher sur toi. Je sais qu’elle entre pourtant, filtrée par ta vision du monde. Alors, dans quel recoin de toi-même l’enfermes-tu ? »

Mon avis

Voilà un roman sensible et drôle qui nous explique que la différence est aussi une richesse et que chaque parcours est unique. Un roman délicieux, très bien écrit et qu’on ne lâche plus avant d’être arrivé à la dernière page. Pour moi, une très jolie découverte.

« Le garçon incassable », de Florence Seyvos, Editions de l’Olivier, 16€.

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