On poursuit la découverte des livres de cette rentrée littéraire avec un roman d’aventures bourré d’humour… publié aux Editions de Minuit. Non, rassurez-vous vous avez bien lu…
Avec « La méthode Arbogast », Bertrand de La Peine signe son troisième roman. Une découverte pour moi que cet auteur quinquagénaire qui enseigne le français à Mayotte.
« La méthode Arbogast » plonge le lecteur dans le quotidien de Valentin Noze, subitement et durablement bouleversé. Tout cela à cause d’un moineau et d’une chute de haut d’un bouleau…
Vous allez me dire, c’est quoi ce truc ? Un roman ! Rondement mené qui se transforme en récit d’aventures. L’air de rien, on se voit dans un film avec Jean-Paul Belmondo dans le rôle-titre.
La quatrième de couv, pour le coup, résume assez bien l’histoire sans la déflorer :
Rien de tout cela ne serait arrivé s’il n’y avait pas eu ce moineau. Ni cette chute du haut du bouleau.Valentin Noze n’aurait pas connu le docteur Arbogast, ni sa méthode d’hypnose par l’image, encore moins ses grenouilles. Il ne serait pas retrouvé sur l’île de Madagascar, et n’aurait pas eu à fuir devant un cyclone ou à pourchasser un ancien mercenaire à travers la forêt de la Montagne d’Ambre… Et puis surtout, il n’aurait pas rencontré Sibylle. Bref, il n’aurait rien vu.
Au fil des 126 pages, un roman qu’on lit comme une bande dessinée. Les cases se suivent, l’histoire se déroule en Belgique puis à Madagascar. Jamais en peine de rebondissements. On y sauve des grenouilles, on y pourchasse un ancien mercenaire devenu trafiquant, on y cherche de fille de bonne famille et un militant écologiste sans vergogne, le tout sur fond de toiles de maître…
Extraits
Pages 45-46 : « […] Depuis une dizaine d’années, il injectait une solution à base de céruléine et projetait des reproductions de tableaux à ses patients. Se produisait alors un effet sédatif sur les lésions. Comme une pommade cicatrisante, vois-tu ? synthétise le docteur. Valentin n’était pas sûr de « voir » quoi que ce soit. Toujours est-il que l’état de bien-être ressenti en sortant de chez Arbogast l’amenait à reconnaître que, malgré la caractère très étrange de cette thérapie, elle se révélait, dans son cas, drôlement efficace. Et tout ça, c’est légal ? Je veux dire, précise le jeune homme, ce n’est pas considéré comme un produit hallucinogène, comme de la drogue ? Arbogast a un petit ricanement. De la drogue ! Les pionniers doivent affronter bien des obstacles. Ce sont des grands incompris… «
Page 82 : « Dérivant en arc de cercle, le boutre laisse sur sa gauche une montagne en pain de sucre émergeant de l’eau ; il remonte la baie de Sakkalave. De grands aplats jaune de Mars, des carrés blancs salis de noir. Du bleu pur, au couteau. Assis à la proue, Valentin découvre la côté de Diégo. Il voyage dans une toile de Nicolas de Staël. »
Page 110 : « Aux abords de la petite ville qui compte quelques milliers d’habitants, se dessinent les spectres d’anciennes villas. Marquises en morceaux, varangues au plancher défoncé, fer forgé devenu végétal le long des jardins fantômes. Celles qui furent la résidence des officiers, au début du vingtième siècle, lorsqu’ils quittaient la touffeur des garnisons de Diégo pour prendre le bon air des altitudes, ne sont plus ces pimpantes villégiatures où cascadait le rire des femmes sirotant des citronnades. Elles ne sont pas vestiges non plus. Les murs, toujours debout, ont connu de multiples tempêtes. Les gloriettes ont passé mais les demeures restent. Elles sont ces fossiles modernes où se lit, sur les plaques émaillées, Villa Marguerite, A la Belle Angeline, le palimpseste du drame colonial. »
Mon avis
Au final, des personnages truculents, des situations rocambolesques et une écriture vive. A lire quand il pleut, dans le train, etc. Un joyeux moment de lecture.
« La méthode Arbogast », de Bertrand de La Peine, Les éditions de Minuit, 13€.