Rentrée littéraire
Pour échapper, le temps d’un dimanche d’été, à sa femme enceinte et à ses trois enfants, Albert s’incruste au baptême de Franny, la fille d’un flic, Fix, qu’il connaît vaguement.
Tandis que les invités se laissent gagner par l’ivresse, il succombe à la beauté renversante de Beverly, la mère du bébé baptisé ce jour de 1964.
Le baiser qu’ils échangent est le premier des éboulements que subiront leurs familles, à jamais liées.
Albert ( que tous appellent Bert) et Beverly se marient et quittent la Californie pour la Virginie.
Albert ( que tous appellent Bert) et Beverly se marient et quittent la Californie pour la Virginie.
Chaque été, ils se retrouvent avec leurs six enfants sur les bras – un petit clan plus ou moins livré à lui-même, prêt à tout pour tromper l’ennui. Mais un drame fait voler en éclats cette fratrie recomposée.
Des années plus tard, alors qu’elle travaille comme serveuse dans le bar d’un hôtel de luxe, Franny a un soir l’honneur inattendu de servir quelques whiskys à un auteur culte qu’elle révère, Leo Posen.
Devenue sa compagne, elle lui livre des confidences sur son histoire, dont il s’empare pour faire son grand retour sur la scène littéraire.
L’immense succès du roman fait resurgir la tragédie familiale et vient à nouveau chambouler les relations entre les membres de cette tribu éparpillée, soudée par le souvenir, le mensonge, la culpabilité. Et un inaltérable attachement.
A travers les parcours de Teresa, Bert, Fix et Beverly on plonge dans l’Amérique des classes moyennes. Leurs enfants – Cal, Holly, Jeannette et Albie d’un côté –, Caroline et Franny de l’autre, mêlent les souvenirs. Ceux des jours heureux. Ceux des jours de drames. La mort de Cal, alors adolescent, en sera un. Qui va bouleverser les deux familles, les trajectoires des uns et des autres.
Alors que Fix se bat contre un cancer, sa fille Franny plonge une fois encore dans les histoires familiales.
Ann Patchett, quinquagénaire installée à Nashville (où elle a d’ailleurs ouvert une librairie), est l’auteure de plusieurs romans dont « Bel Canto » – qui a valu le prix PEN/Faulkner Award – a un talent évident pour raconter des histoires, même sur plusieurs décennies !
Avec « Orange amère », elle livre un roman poignant et tendre sur l’enfance, sur les liens qui durent et sur le mystère qui entoure toujours la notion de famille.
Extraits
Page 57 : » « Et ensuite, qu’est-ce qu’il s’est passé ? » demanda Franny. C’était à ça que ça servait d’accompagner son père en chimio, alors qu’aucun médecin n’évoquait un traitement curatif : à passer le temps qu’il lui restait avec lui, en recueillant toutes ses histoires. Voilà pourquoi Caroline et Franny prenaient un avion pour Los Angeles à tour de rôle, parce qu’elles n’avaient jamais passé beaucoup de temps avec lui. Ça permettait à Marjorie de faire une petite pause, parce qu’elle se coltinait tout le boulot, mais surtout ça leur donnait une chance de découvrir les histoires qu’il allait emporter avec lui. Ce soir, quand son père serait allé se coucher, elle appellerait Caroline pour lui raconter ce qui était arrivé à Lomer. »Page 125 :« Fix avait préféré Caroline avant même d’entrer en fac de droit. Elle était plus âgée, et comme ils avaient partagé plus de temps avant le divorce, ils se connaissaient mieux. Et puis la haine de Caroline pour Bert brûlait comme une une flamme translucide, et elle faisait tout pour gâcher la vie de sa mère, avant de tout rapporter à son père. Fix lui disait de se calmer tout en prenant un malin plaisir à écouter son reportage détaillé. Lui aussi aurait adoré avoir l’occasion de gâcher la vie de Beverly. Caroline ressemblait à Fix – mêmes cheveux bruns, même peau qui dorait à l’instant où ils arrivaient sur la plage. Franny avait trop pris de sa mère, trop délicate, et blonde, et maladroite. Trop jolie et en même temps jamais aussi jolie. »Page 145 :« […] Mais c’étaient des années de vaches maigres pour la charité émotionnelle, et en dépit de toutes les nuits où Jeannette s’accrochait à sa résolution d’être plus gentille, la gentillesse n’était jamais au rendez-vous. Sans son père, sans Cal, les quatre membres survivants des Cousins de Californie du Sud devinrent plus profondément eux-mêmes, comme si toute l’aptitude sociale que chacun avait acquise dans la vie s’est évaporée dans le laps de temps qu’il faut à une abeille pour piquer un gamin. La vitesse à laquelle leur mère se ruait du travail, à l’école, au supermarché avait doublé. Elle était sans cesse en train d’arriver, sans cesse en train de partir, jamais là. Elle passait son temps à chercher son sac, ses clés de voiture. »
« Orange amère », d’Ann Patchett, Actes sud, 22, 50€