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Roblès 2013

C’est reparti ! Le prix Roblès 2013 a démarré il y a quelques jours.

L’idée ? Des comités de lecteurs vont, à travers tout le département du Loir-et-Cher mais aussi ailleurs en France et dans le monde, lire les six premiers romans sélectionnés avant d’en élire un. Parmi ces lecteurs, des professionnels mais aussi et surtout des amoureux de la littérature, des rencontres.

Rappelons que le prix Emmanuel Roblès organisé par les bibliothèques de Blois-Agglopolys existe depuis 1990. Il est décerné chaque année en juin à l’auteur d’un premier roman écrit en langue française. La sélection soumise au choix de ces comités de lecteurs est étroitement liée à celle établie par les jurés du Prix Goncourt du premier roman.

Pour ceux qui se demandent qui était Emmanuel Roblès (1914-1995), voici quelques infos.  Il publie ses deux premiers romans avant la Seconde Guerre mondiale, « L’action » et « Travail d’homme ». En 1948, il obtient le prix Fémina pour « Les hauteurs de la ville ».

Roblès, éditeur au Seuil est aussi l’auteur d’une pièce de théâtre, il collabore à l’écriture de scénarii et d’adaptations de roman pour Luis Buñuel et Luchino Visconti au cinéma et à la télévision. Elu à l’Académie Goncourt en 1973,  il se rendait régulièrement à Blois pour la remise du Prix Goncourt du Premier Roman.

Découvrez l’article paru dans la Nouvelle République  ici.

Et la sélection 2013 ?

  •  « La Plume de l’ours », Carole Allamand, Stock.
  •  « Le Coursier de Valenciennes », Clélia Anfray, Gallimard.
  •  « Viviane Elisabeth Fauville », Julia Deck, éditions de Minuit.
  • « Sauver Mozart », Raphaël Jerusalmy, Actes Sud.
  •  « L’Angle mort », Véronique Merlier, Arléa.
  •  « Un homme effacé », Alexandre Postel, Gallimard.

Retrouvez ici l’un des romans sélectionnés.

VIVIANE COUVUn livre bizarre. Et une façon d’aborder la folie plutôt originale. Voilà ce qui ressort du premier roman de Julia Deck, intitulé « Viviane Elisabeth Fauville ».  Julia Deck livre là un premier roman réussi et prometteur. L’ancienne chargée de communication (elle a quitté son métier en 2005 pour pouvoir écrire) devenue secrétaire de rédaction a intégré la maison Minuit… au bout d’un seule tentative. Une jolie prouesse !

 

 

Je vous raconte ? Il suffit de jeter un coup d’oeil à la quatrième de couverture :  « Vous êtes Viviane Elisabeth Fauville. Vous avez quarante-deux ans, une enfant, un mari, mais il vient de vous quitter. Et puis hier, vous avez tué votre psychanalyste. Vous auriez sans doute mieux fait de vous abstenir. Heureusement, je suis là pour reprendre la situation en main ».

 Julia Deck nous plonge dans une histoire pas banale, à travers Paris et surtout à travers les personnalités de son héroïne qui avec sa fille, son mari, son psy ou le policier ne se comporte jamais de la même façon. Et la jeune femme de se lancer dans une curieuse enquête : elle suit et rencontre tous ceux qui auraient eu une bonne raison de mettre fin à la vie dudit pyschanalyste, fait divers excessivement rare, par ailleurs ( j’ai vérifié!).

Viviane Elisabeth Fauville est chargée de communication chez les bétons Biron. Bonne place, bon salaire. Mais ces certitudes de bourgeoise s’éffritent les unes après les autres. Son mariage, les règles de l’ordre social. Mais la psychanalyse n’est plus ce qu’elle était. Alors l’héroine sombre.

 

 

Pendant 155 pages, vous vous laissez prendre au jeu du personnage principal, sérieusement frappé quand même, incarné par plusieurs pronoms personnels. Tandis qu’elle décroche et bascule lentement, elle s’accroche cependant à ses repères spatio-temporels dans Paris. Et arrive à faire détourner les soupçons de meurtre sur d’autres… tout en administrant des médicaments non-appropriés à sa petite fille…

Une vidéo ici pour découvir l’auteure

Extraits

Page 13 : « Jusqu’à deux heures de l’après-midi, vous accomplissez les formalités administratives liées au démanégement, au divorce, à l’allocation de parent isolé. Vous achetez aussi quelques vêtements, passez chez le coiffeur, acceptez les services de la manucure. Autrefois, vos amies déjà mères se plaisaient à répéter que vous, qui ne le seriez sans doute jamais, aviez bien de la chance de pouvoir vous occuper de vous. La chance tournerait-elle, vous avez résolu d’épargner à votre descendance la responsabilité de votre beauté racornie. »

Pages 76-77 : « En somme, la veuve est libre, et je prends aussitôt mon poste rue du Roi-de-Sicile. Je n’ai eu aucun mal à me procurer l’adresse. Propulsés sur le devant de la scène, les héros de faits divers n’ont pas eu le temps de se mettre sur liste rouge : ils figurent tous dans l’annuaire. Sur Internet, il est aussi très facile de visualiser l’emplacement de leur pâté de maisons, de le survoler, et même de se faire une idée de la façade. Enfin, j’ai localisé un porche à proximité où monter la garde. Cette fois, je n’ai pas fait de manières pour endormir la petite, qui s’est insurgée lorsque j’ai voulu vaquer à mes occupations. Je lui ai adminitré ces produits qu’on dit nuisibles en dessous de six ans, mais je les connais, ces tisanes, elles n’endorment que les morts : tout juste induiront-elles une vague somnolence. Puis j’ai quitté l’appartement en poussant à fond les radiateurs, j’aime que ma fille ait bien chaud. »

 Page 110 : « Vous conservez un souvenir assez précis de votre mariage. A cette époque, chaque instant était une fête, et la grimace du docteur semblait dire ma pauvre, vous avez vingt ans de retard. Oui, vous en aviez près de quarante et l’impression de marcher sur l’eau. Vous étiez insupportable. Le moindre événement était prétexte à raconter comme on vous aimait, comme vous aimiez. Le docteur rongeait son frein mais vous n’en aviez cure. Il était payé pour entendre, aucun détail ne lui serait épargné. Il attendait son heure. »

 Mon avis

Assassiner son psychanalyste avec un couteau de cuisine offert par sa propre mère, avouez que ce n’est pas banal… Ce roman, délicieusement foutraque, est un petit plaisir de lecture. Un premier roman prometteur. Et une approche de la folie douce puis meurtrière plutôt originale. Un bon cru, aussi pour le prix Roblès. Mais ça n’engage que moi. A suivre !

« Viviane Elisabeth Fauville », Julia Deck, Les éditions de Minuit, 13,50€.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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