Pour ce dernier week-end des vacances, Case Départ vous propose sa petite sélection de la semaine. En vous ouvrant sa bibliothèque, le blog met en lumière de très bonnes bandes dessinées. Parmi les albums, il y a : le huitième recueil de gags désopilants de Joe Bar Team, le premier tome de la nouvelle série de Jean-Claude Servais : Les chemins de Compostelle, Garçon manqué : l’autobiographie de Liz Prince sur la différence, l’ultime volume de l’excellent manga : Evil eater, le premier opus du manfra de Guillaume Stey : Loa et un album jeunesse muet Monsieur Lapin, les ballons de Dauvillier & Amsallem. Bonnes lectures.
Joe Bar Team, tome 8
Poignet au guidon, les huluberlus de Joe Bar Team sont de retour sous les pinceaux de Fane. Les héros créés par Bar2 reviennent dans un huitième recueil très réussi de gags en une planche.
Résumé de l’éditeur : Ils écument les routes depuis un moment : des champions de quartier aussi vantards qu’intrépides, la mauvaise foi et le sarcasme élevés au rang d’art, avec un sens des trajectoires parfois aléatoire et une carte de fidélité pour l’hosto du coin… Vous les avez reconnus ? Eh oui : sortez les bottes de paille, après 4 ans d’absence, les cinglés du Joe Bar Team sont de retour ! Jéjé, Paulo, Pierrot – sans oublier les anciens – reviennent essorer la poignée de gaz pour nous offrir une nouvelle flopée de gags désopilants dont ils ont le secret, fleurant bon l’huile moteur et la gomme brûlée. Sous le regard parfois consterné de Joe…
Pour ce huitième opus, on retrouve un habitué de la Joe Bar Team en la personne de Fane. Après le tome 7 signé Perna et Jenfèvre, l’auteur de La légende de Little Boost (avec Juan, Vents d’ouest, 2014) qui avait réalisé les volumes 2, 3 et 4 est de retour aux manettes, pour notre plus grand plaisir. Celui qui avait introduit de nouveaux personnages à ceux initialement créés par Bar2, livre ici de très bons gags. Sur la totalité de l’album, seuls deux ne nous ont pas fait rire ; c’est vous dire le très bon niveau de ce recueil. Drôle et jubilatoire, les mini-récits raviront les amateurs de la Team et des grosses cylindrées.
Celui qui avait rencontré Christian Debarre, alias Bar2 en entrant dans une agence de publicité à seulement 19 ans, éprouve de l’affection pour ses personnages et cela se ressent. Après 10 ans loin de Lafouine & Co, on sent bien qu’il ne lui a pas fallu très longtemps pour entrer dans les bottes de ses motards préférés. L’univers des ces fêlés de vitesse est tellement riche que cela semble simple de créer de nouvelles histoires. Il se revendique de l’esprit du talentueux André Franquin et là encore cela se ressent dans son trait, généreux et spontané.
- Joe Bar Team, tome 8
- Auteur : Fane, d’après les personnages de Bar2
- Editeur: Vents d’ouest
- Prix: 9.99€
- Sortie: 22 octobre 2014
Les chemins de Compostelle
Petite Licorne est le premier tome de la nouvelle saga de Jean-Claude Servais, Les chemins de Compostelle, qui conte les trajectoires de quatre personnages sur les sentiers menant à la ville chrétienne espagnole.
Résumé de l’éditeur : Lieu hautement symbolique, Compostelle attire chaque année des milliers de pèlerins à travers l’Europe. Blanche, Céline et Alexandre vont, eux aussi, emprunter ce chemin à un moment de leur vie. Dépositaire d’un savoir précieux auquel son grand-père alchimiste l’a initiée, Blanche part de Belgique sur ses traces, après qu’il eut été retrouvé sans vie sur une plage près de Compostelle.
Le point de départ de Céline se situe au Mont-Saint-Michel, où elle a commencé son noviciat. Quant à Alexandre, guide de montagne dans les Alpes suisses, c’est le décès de Margaux qui va le jeter, lui aussi, sur cette route pleine de questions, mais peut-être aussi de réponses.
Prévue en sept volume, le nouveau long récit de Jean-Claude Servais mêle habilement l’histoire, la spiritualité, l’onirisme et les mystères. Pour ce premier tome, il décrypte les liens très forts qui unissent Blanche et son grand-père. La jeune femme part sur les traces de cet homme, alchimiste et doux-rêveur, jusqu’à Compostelle. Lorsqu’elle était plus petite, le maître-brasseur et sculpteur l’avait accueilli avec sa mère et son père chez lui. Ce grand passionné de pierres et de transformations chimiques mystérieuses aimait à lui raconter des histoires folles. Celle qu’il prénommait Petit Licorne aimait beaucoup les livres et notamment Tendre Violette, récit dessinée de Servais lui-même. Cet homme affable et chaleureux, Blanche éprouvait pour lui une infinie tendresse. Alors qu’il décéda, la fille devenue adulte lui jura de parcourir cette longue marche de Bruxelles à la cité espagnole, traversant la France. Alors qu’il était plutôt athée et bouffeur de curé, il réussit à lui inculquer son amour des voyages et de la méditation. Pour donner vie à Papounet, l’auteur de Fanchon (Dupuis, 1998) ou Isabelle (Le Lombard, 1984) lui a donné les traits de Bernard Tritiaux, un artiste à mille facettes. Pour les sculptures de son personnage, il s’est inspiré d’un artiste de son voisinage. Il aime se nourrir de ce qui l’entoure et notamment sa région du Gaumais en Belgique, qu’il met encore en scène pour les décors de la brasserie. Servais, qui nous avait habitué à des histoires courtes en one-shot, se lance donc un grand défi en mettant en scène une saga en 7 volumes. En tentant de livrer un album par an, il devra maintenir une cadence jusque là inconnue pour lui. Lui que nous connaissions virtuose dans les décors naturels, livre ici un époustouflant travail sur les décors urbains et notamment ceux concernant Bruxelles. Les architectures de la capitale belge sont majestueuses (cathédrale, Grand Place) mais aussi celle du Mont-Saint-Michel permettent de créer des cases fabuleuses. Pour cela, il s’est rendu sur place pour s’imprégner aux mieux des lieux et livrer une version des plus fidèles des endroits visités par les héros. Il faut ajouter à cela, son trait réaliste toujours aussi sensuel et élégant pour les personnages.
Un beau début de saga entre Histoire, spiritualité et alchimie.
- Les chemins de Compostelle, tome 1/7 : Petite Licorne
- Auteur : Jean-Claude Servais
- Editeur: Dupuis
- Prix: 16.50€
- Sortie: 17 octobre 2014
Garçon manqué
Dans Garçon manqué, Liz Prince raconte son enfance délicate, son mal être ; petite fille mais pas réellement garçon. Cet entre-deux difficile lorsque l’on est enfant, entre maladresse et humiliations des personnes qui l’entourent.
Résumé de l’éditeur : Liz Prince a grandi dans la banlieue de Santa Fé, au Nouveau Mexique, à la fin des années 1980. Elle n’était pas du tout girly et détestait s’habiller « en fille », mais elle n’était évidemment pas non plus un garçon, comme lui fit clairement comprendre le coach de base-ball de l’équipe junior locale. Elle était quelque part entre les deux. Et ce n’était pas une zone très confortable, avec les forces de l’école primaire, du collège, de ses parents, de ses amis et de ses amours qui la tiraillaient dans un sens ou dans l’autre… Petit à petit, au fur et à mesure de ses rencontres, elle apprend à composer avec les réactions de son entourage et à se construire une identité propre.
Garçon manqué (Tomboy, en anglais, publié par Zest Book aux Etats-Unis) est une belle autobiographie de Liz Prince et ne devrait pas laisser les lecteurs indifférents. Mettant en scène d’une façon judicieuse sa propre enfance, l’auteure livre un récit sensible, tendre avec des petites touches d’humour qui rendent son histoire si touchante. Cet ouvrage suit donc Liz de ses jeunes années jusqu’à l’âge adulte.
Dès ces cinq ans, Liz fait des crises à ses parents pour ne pas porter des robes comme les autres filles de son âge. Son look a de quoi désarçonné dans les années 80 : casquette rouge, veste grise, pantalon et baskets. Accompagné de son fidèle Popple (une peluche issue d’une série animée), elle ne peut pas être obligé par sa propre maman, qui elle non plus n’aime pas en porter. D’ailleurs toute petite, elle préfère jouer à des jeux de garçons, se bagarre avec eux et reçoit en cadeau toutes sortes de figurines de super-héros. L’un de ses plus grands plaisirs était de se déguiser en héros qu’elle admirait (Luke Skywalker, Indiana Jones, Dennis la malice ou Huck Finn) ; que des modèles hommes. Mais elle n’est pas pour autant un garçon. Cet entre-deux inconfortable, elle le subira de la part de ses camarades de classe, ses voisins, voire même son petit frère Jamie. Entre maladresses et humiliations, la petite fille s’en relèvera et en sortira plus forte. Malgré ses difficultés, elle sera toujours entourée de personnes bienveillantes, comme ses parents et ses amis Frank, Carlos et Rob. Mais aussi Terri et Erin, deux autres garçons manqués qui deviendront ses amies, lorsque la famille s’est agrandi (Kristy sa petite sœur) et a déménagé à l’autre bout de la ville. Teintées d’un bel humour, ces tranches de vie sont écrites avec beaucoup de justesse et de pudeur. Ce cheminement long, telle une introspection permet de mettre en lumière le développement personnel de chacun. Son histoire pourrait convenir à beaucoup d’entre nous (garçon manqué ou non), entre choix de vie, personnalité et affirmation de soi. D’un simple trait tout en rondeur, l’auteure de Delayed Relays (çà et là, 2007) atteint son but : livrer un album sur la différence avec beaucoup de franchise et d’humour.
Hétéro, homo, garçon, fille, végétarien, artiste, sportif, chercheur, intellectuel, manuel… : Garçon manqué est un hymne à la différence ; ce que l’on souhaite être et non pas ce que les autres voudraient que l’on soit.
- Garçon manqué
- Auteur : Liz Prince
- Editeur: çà et là
- Prix: 20€
- Sortie: 21 octobre 2014
Evil eater
Issei Eifuku et Kojino mettent un point final à leur excellente série Evil eater. Publié par Ki oon, le 23 octobre, le troisième et ultime tome de ce thriller est toujours aussi passionnant.
Pour vous rafraîchir la mémoire, consultez les deux chroniques des précédents tomes : le volume 1 et le volume 2.
Nous retrouvons Amagi et Nagumo, les deux agents sorcieristes dans le Tokyo futuriste où ils tentent d’accompagner au mieux les Returners dans leur nouvelle vie. Ecartant les futurs bugs de ces revenants, ils doivent aussi lutter contre Shinobu Shinonome, le plus terrifiant des returners. Cet homme dont Nagumo a eu la charge autrefois, qui se dit résistant à son bug et qui semble savoir ce qu’est devenue la mère d’Amagi.
Nous vous avions assuré lors de la lecture des deux premiers volumes que la série était formidable et nous ne sommes pas déçus avec cet ultime opus. Dans les trois premiers chapitres de ce volume 3, nous assistons a un combat d’anthologie entre Nagumo, Amagi et Shinobu. Tous les coups sont permis, la violence est au rendez-vous et nous découvrons le pouvoirs surpuissant de la jeune femme. Le returner est toujours aussi détestable et oppose beaucoup de résistance aux deux sorcieristes. Les événements s’enchaînent avec du rythme et les rebondissements sont nombreux : le secret de la mère d’Amagi ou le passé trouble de Nagumo. Les relations du duo de héros prend une nouvelle dimension, plus humaine et plus amicale.
Le récit dense et très solide d’Issei Eifuku est aussi un réquisitoire contre la guerre (les premiers returners étaient des anciens soldats japonais décédés lors de la Seconde Guerre Mondiale) mais aussi contre le système judiciaire du pays du soleil levant et plus particulièrement contre la peine de mort.
Le trait de Kojino est toujours d’une grande qualité et efficacité. Dans la première partie du manga, il livre des planches d’une belle puissance graphique où les combats sont d’une grande noirceur. Dans la seconde partie, les révélations sur le passé des personnages principaux sont elles aussi, très bien mises en scènes soulignées par des bordures noires.
Evil eater : une excellente série manga addictive, alliant le suspens, une grande dose d’action et fantastique. Un final en apothéose. Formidable ! A lire !
- Evil eater, 3/3
- Scénariste : Issei Eifuku
- Dessinateur : Kojino
- Editeur: Ki oon
- Prix: 7.65€
- Sortie: 23 octobre 2014
Loa
Le français Guillaume Stey propose une nouvelle série Loa. Publiée par les éditions Delcourt, ce manga met en scène deux personnages à la recherche d’artefacts qui renferment chacun un pouvoir ultra-puissant.
Résumé de l’éditeur : Éline, jeune fille de 16 ans habitant une curieuse planète, sauve par hasard un étrange garçon de la noyade. Il dit s’appeler Loa et lui avoue être à la recherche d’artefacts extrêmement puissants. Chacun renferme un pouvoir différent qui, s’il tombe entre de mauvaises mains, peut avoir des conséquences catastrophiques. Ces mauvaises mains, ce sont celles de Duc, l’impitoyable fils de la famille royale.
Ce manga est un global manga ou manfra (un manga français) dont le récit un peu trop classique de Guillaume Stey ressemble à un shônen. Le jeune auteur normand ne cache pas ses influences et ses clins d’œil dans son histoire : les deux personnages principaux se lancent à la recherche de Stolyces (artefacts à la puissance magique) qu’ils doivent réunir ; un peu comme San Goku dans Dragon Ball d’Akira Torriyama et les 7 boules à rassembler. D’ailleurs Loa a quelques points communs avec le célèbre héros : comme lui, on ressent une petite candeur et une certaine naïveté dans ses faits et gestes. Ce jeune adolescent dont on ne connaît ni le passé ni les motivations est très attachant. Fonçant tête baissée sans trop réfléchir aux conséquences, livrera une très belle opposition au Duc et à ses hommes, vrais méchants comme on les aime. Eline, la jeune fille qui le sauve, est quand à elle, beaucoup plus mâture, entraînée malgré elle dans les aventures de Loa. Son père se révélera d’ailleurs comme une sorte de commanditaire des attaques contre le jeune garçon. Difficile donc pour l’adolescente de faire la part des choses : d’un côté son père et de l’autre, ce nouvel arrivant. Pour sa première publication, Guillaume Stey propose des planches aux décors foisonnants, aux engins volants amusants et aux animaux attachants. Là encore, on sent les influences de Toriyama ou Otomo, voire parfois Moebius. On attend néanmoins un peu plus d’originalité dans le deuxième tome après un début prometteur.
- Loa, volume 1
- Auteur : Guillaume Stey
- Editeur: Delcourt manga
- Prix: 7.99€
- Sortie: 24 octobre 2014
Monsieur Lapin
Après La carotte sauvage et La chasse aux papillons, Loïc Dauvillier et Baptiste Amsallem proposent une nouvelle aventure de Monsieur Lapin. Pour cette histoire muette destinée aux très jeunes lecteurs, le petit animal s’amuse avec Les ballons.
Résumé de l’éditeur : Petit Lapin est en prise avec un sachet de ballons gonflables de toutes les couleurs. Il a beaucoup de difficultés à en gonfler un correctement. Soit qu’il n’a pas assez de souffle, soit que le ballon éclate… Comme s’il n’avait pas assez de difficultés seul, un nouveau personnage apparaît dans la série : Petit Cochon, qui va mettre des bâtons dans les roues de l’entreprise de Petit Lapin à l’aide de sa sarbacane…
Ce récit pour les primo-lecteurs est d’une très grande sensibilité portée par une histoire simple mais efficace signée Loïc Dauvillier. Le scénariste de Myrmidon (avec Thierry Martin, La gouttière) et de La petite famille (avec Marc Lizano, La gouttière, 2013) met en scène un petit personnage sympathique, amusant et un peu naïf mais très attachant. Pour cette histoire, le lapin joue avec des ballons gonflables et cela ne se déroule pas de la meilleure des manières. Entre le sachet à ouvrir, la difficulté à les gonfler et un cochon qui les éclate avec une sarbacane, Monsieur Lapin joue de malchance. Comme dans tous les albums jeunesse, le happy-end est essentiel.
Le trait de Baptiste Amsallem est d’une grande qualité et convient parfaitement pour ce style de récit. Des personnages d’une belle rondeur, des décors a minima pour laisser toute la place aux héros et des couleurs douces et chaudes. De plus, le découpage dans un style cinématographique permet de rythmer le récit et permet aux plus petits de pouvoir entrer dans l’histoire facilement.
- Monsieur Lapin, les ballons
- Scénariste : Loïc Dauvillier
- Dessinateur : Baptiste Amsallem
- Editeur: Des ronds dans l’o
- Prix: 12.50€
- Sortie: 30 octobre 2014
Bonjour Damien,
Merci pour ce merveilleux article sur notre Monsieur Lapin, ça nous fait extrêmement plaisir !
À bientôt peut être !
Merci pour votre retour de lecture de M. Monsieur Lapin.
Loïc
Loïc et Baptiste, votre petit album étant d’une belle qualité et très réussi, il était normal d’en parler de la sorte. En attentant une nouvelle aventure de Monsieur Lapin.
DC